Les examens de fin d’année scolaire 2023-2024 ont livré leur verdict. Et nous connaissons les apprenants admis, mieux les meilleurs pour chaque examen. Le Certificat d’Etudes Primaires (CEP) session de Juin 2024 donne une fille comme première ayant obtenu la plus forte moyenne à cet examen. Découvrons cette lauréate du CEP 2024, Mabelle Fifamè Agbomenou, qui nous fait plonger dans son quotidien depuis son parcours scolaire à son projet d’étude.
Crayon à la main, feuille blanche sur table, elle s’applique au dessin dans un centre culturel dénommé Akanga à Porto-Novo. Vêtue d’une robe en tissu de pagne africain, lunettes aux yeux, cheveux en natte avec deux chignons de part et d’autre, sourires aux lèvres, elle se laisse présenter par son père à l’équipe de reportage « c’est bien Mabelle que vous voulez voir ! ». Cette fille qui se laisse découvrir est, en effet, la première du Bénin au Certificat d’Etudes Primaires (CEP) 2024.
Mabelle et son jeune frère Merveil, accompagnés par leurs parents, participaient à un atelier de dessin organisé par le centre culturel. Sans protocole et pour satisfaire à notre quête de l’information, les échanges se font dans une atmosphère conviviale et décontractée. Celle dont l’excellence s’impose depuis quelques semaines de par sa brillante réussite au CEP est à l’état civil Mabelle Fifamè Agbomenou. Agée de 11 ans, taille autour de 1m 50, elle est une métisse née d’un père béninois au nom de Cherlin Marceau Agbomenou, ingénieur en électrotechnique, et d’une mère allemande Mélanie Herbolzheimer Agbomenou, éducatrice de profession.
Fréquentant le Complexe scolaire ‘‘La Rosette’’ à Porto-Novo, les performances de Mabelle F. Agbomenou au CEP se sont révélées, faisant d’elle la meilleure des candidates et candidats à cet examen qui donne droit au premier cycle de l’enseignement secondaire. Sur cette performance enregistrée, elle s’étonne bien de son résultat : « J’étais un peu étonnée, je pouvais concevoir que je serais la deuxième ou troisième du département de l’Ouémé ou même à un autre rang, mais me retrouver à la première place au plan national est une grosse surprise pour moi ». Réaction identique chez le géniteur de Mabelle Agbomenou qui confie avoir simplement reçu de l’enseignant de sa fille, la liste par ordre de mérite des cinquante premiers par département avec précision de leurs moyennes respectives : « En parcourant progressivement ces listes obtenues, je me rends alors à l’évidence que c’est ma fille qui est enfin la première. J’en doutais encore lorsque son maître nous passe un coup de fil pour dire son constat et surtout confirmer la nouvelle que Mabelle est enfin la première au CEP dans tout le Bénin, avec une moyenne de 19,63 », laisse entendre Cherlin Marceau Agbomenou.
Mabelle Agbomenou
Du parcours scolaire de la première au CEP
Mabelle Agbomenou a commencé son cursus scolaire en Allemagne, pays d’origine de sa mère. Elle y a fait deux années de primaire avant de se retrouver au Bénin où en fonction de son niveau, elle a été inscrite en classe de CE2. En effet, cette fille a grandi dans deux milieux différents où les réalités n’étaient pas les mêmes en ce qui concerne les études. Elle doit s’adapter au nouveau contexte linguistique et au système d’évaluation des apprenants au Bénin. « En Allemagne, les notes varient de 6 à 1, les plus faibles ont 6 et la meilleure note est 1. Moi j’avais souvent 1 après les évaluations, c’est cette meilleure note que j’ai toujours obtenue, mais pas moi uniquement, d’autres camardes de classe l’obtenaient également », précise Mabelle Agbomenou. N’est-ce pas ce goût de l’excellence que cette fille a davantage cultivé en elle une fois au Bénin pour obtenir de bons résultats en classe ? Cela est de toute évidence, car du CE2 au CM2 dans son établissement à Porto-Novo, elle a brillé à travers ses résultats. Mais cela n’était pas sans difficultés au départ, car Mabelle Agbomenou avoue avoir quelques soucis en démarrant son cursus au Bénin : « au début, j’ai des problèmes parce que je ne sais ni lire ni écrire en français, donc en orthographe, cela n’allait pas bien, toutefois j’ai fait des efforts avant de passer au CM1 avec une bonne note ».
Progressivement, Mabelle Agbomenou s’adapte au système éducatif béninois. Son passage en classe de CM2 n’était pas sanctionné par la plus forte note de la classe, mais une fois au CM2, elle a souvent eu la plus forte note de la classe, même si elle a cédé deux fois de suite sa place de première.
De son encadrement à la maison
Aujourd’hui première du Bénin au CEP, Mabelle F. Agbomenou n’a jamais eu de répétiteur à la maison. Ses parents l’ont voulu ainsi, car ils attachent du prix à l’éducation qu’ils transmettent eux-mêmes à leurs enfants. A en croire Cherlin Marceau Agbomenou, père de Mabelle, soit lui-même, soit son épouse se charge de déposer chaque jour les enfants à l’école et de les ramener à la maison, et ceci avec tout le suivi qu’il faut. Au regard de ce suivi, les parents de Mabelle estiment qu’ils n’ont pas besoin de prendre un répétiteur pour l’encadrement de leur fille à la maison. Le rythme de travail à l’école semble être favorable à cette option : « à l’école, on nous donne chaque fois des exercices à faire, beaucoup de devoirs, des épreuves d’examens des années antérieures à traiter, des épreuves de concours de prytanée auxquelles on nous soumettait. Bref il y avait de quoi pour mieux se préparer pour l’examen du CEP », martèle Mabelle F. Agbomenou.
Certains principes sont chers aux parents de Mabelle à savoir. Il s’agit de la structure et de l’organisation en toutes choses, l’autogestion du temps par l’enfant lui-même et surtout l’autonomie accordée à chaque enfant pour définir ses priorités. « A nos enfants (ils sont deux : Mabelle et son jeune frère Merveil), nous leur donnons le pli d’être structuré, ils ont le cadre qu’il faut. Chez nous, il y a une heure pour manger, une heure pour dormir, nous donnons la priorité aux divertissements pour que l’enfant soit bien épanoui et équilibré. Nous sommes convaincus que la vie de l’enfant ne se limite pas à l’école », confie le père de Mabelle. Quant à sa mère, il s’agit d’œuvrer à favoriser le plein épanouissement de leurs enfants : « nous avons fait l’option d’être toujours présents pour les enfants et d’observer leur évolution. Ce faisant, nous avons remarqué que Mabelle travaille très bien et que ses efforts ont toujours payé », affirme Mélanie Agbomenou.
Photo de famille de la championne du CEP 2024 avec ses parents
Des secrets de réussite au projet d’étude
Pour parvenir à ce résultat excellent au terme de ses études primaires, Mabelle F. Agbomenou a un mode de fonctionnement très serein. Chose étonnante, la distraction occupe une bonne partie de son agenda : « comme distraction, j’aime dessiner, faire la lecture, pratiquer la natation, faire le roller » confie-t-elle, avant de signaler que son week-end est réservé aux loisirs et cela lui permet d’avoir une forte capacité de rétention une fois les cahiers en main. A la question de savoir quels sont ses secrets de réussite, la première du Bénin au CEP 2024 indique qu’elle se consacre à la relecture de ses leçons pour une révision méthodique, qu’elle est très attentive en classe et qu’elle lit beaucoup. La mère de Mabelle n’hésite pas à témoigner des qualités de sa fille qui lui ont permis d’obtenir ce record au CEP : « notre fille est très curieuse, très disciplinée, perfectionniste et créative », martèle Mélanie Agbomenou qui se sent très honorée par sa fille.
Si le CEP est aujourd’hui en poche, il y a encore du chemin sur le plan académique. Pour la suite des études, les parents de Mabelle F. Agbomenou réfléchissent toujours à son orientation, mais n’entendent pas la faire inscrire au lycée militaire des jeunes filles qui reçoit les meilleures à l’examen du CEP pour continuer leurs études. Toutefois, la fille en question a déjà des projets même s’ils sont encore imprécis. Aimant le dessin, Mabelle pense qu’elle pourrait s’orienter vers l’architecture. A partir de cette performance au CEP, elle souhaite maintenir le cap afin de garder allumer la flamme de l’excellence.
Obed SAGBO