Nommé tout nouvellement à la tête de la Direction de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues Nationales (DAPLN), Coffi Sambieni, est professeur titulaire de linguistique à l’Université d’Abomey-Calavi au Département des Sciences du Langage et de la Communication. Il est fier de l’héritage reçu et engagé à faire rayonner le sous-secteur de l’Alphabétisation.
Educ’Action : Depuis quelques jours, vous êtes le nouveau DAPLN. Quels sentiments vous ont animé lorsque vous avez appris la nouvelle ?
Coffi Sambieni : Des sentiments de fierté et de joie, puisque nous avions postulé à la prise en main de cette direction qui manquait d’un peu plus de visibilité en dépit de son importance et du travail qui s’y abattait, dès lors que l’Etat a émis l’appel à candidatures afin de contribuer à apporter un peu plus aux résultats actuels. Nous étions certainement nombreux à postuler. Bien qu’il soit vrai que je ne doutais pas de mes compétences au cours du processus de recrutement, comprenez, avec moi, qu’une compétition demeure une compétition. Cette annonce était donc d’une joie immense pour moi.
Comment se porte la DAPLN dont vous avez hérité ?
J’ai hérité d’une direction très dynamique et entreprenante avec un personnel qualifié et rompu à la tâche. Le Bilan est tout à fait positif à ma prise de service, le plan de travail de l’année en cours est en exécution. En effet, la Direction de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues Nationales a une responsabilité plus ou moins complexe qui nécessite beaucoup de présence, d’attention, et d’assiduité dans la mise en œuvre et du suivi rigoureux des différentes tâches à mener en vue de combler convenablement les attentes.
Ainsi, les objectifs du Ministère des Enseignements Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle, donc du Gouvernement du président Patrice Talon ambitionnent de rendre l’alphabétisation plus fonctionnelle et au-delà, d’en faire un instrument à la portée de tout Béninois, mais surtout au service des artisans, des femmes et des jeunes. C’est en cela qu’entre autres missions à elle assignées, la DAPLN est chargée de la mise en œuvre du contrôle et de suivi-évaluation des politiques et stratégie de l’Etat en matière d’alphabétisation, d’éducation/formation des adultes et de la promotion des langues nationales. A ce titre, elle doit élaborer et promouvoir les programmes intégrés d’alphabétisation et d’éducation/formation des adultes, veiller à l’amélioration de la qualité, de la pertinence et de l’efficacité des centres d’alphabétisation. Elle est également chargée de concevoir et de rendre opérationnel un système d’information intégré de gestion de l’alphabétisation et de l’éducation/formation des adultes et d’assurer l’usage des Technologies de l’information et de la communication et le numérique dans le dispositif d’alphabétisation et éducation/formation des adultes et les consolider à travers la mise en place de contrats-plans etc.
Aujourd’hui, beaucoup d’initiatives sont en cours à la DAPLN, en l’occurrence la codification des langues nationales qui résoudra un problème profond dans l’alphabétisation. Toutefois, le sous-secteur reste confronté à de nombreux autres défis.
Quels sont les défis actuels du sous-secteur de l’Alphabétisation ?
En dépit des efforts réalisés jusque-là, le sous-secteur de l’alphabétisation a encore du chemin. L’environnement actuel de l’alphabétisation a besoin d’un appui conséquent à plusieurs niveaux. La mise en place d’un système efficace de gestion impliquant tous les acteurs, la définition d’une ligne financière conséquente en guise de facilitation des réalisations des activités-objectifs inscrites aux différents PTA, la mise à disposition d’infrastructures adéquates pouvant abriter une direction digne du nom, permettant un meilleur rendement de ses cadres ainsi que les centres d’apprentissage dans les différentes communes, la mise en place d’une stratégie de l’alphabétisation et de l’éducation des adultes, constituent, entre autres, les attentes de la DAPLN pour une poursuite efficace de la mise en œuvre de l’alphabétisation dans notre pays.
En prenant cette nouvelle charge, cette direction, quels sont vos objectifs ?
L’alphabétisation en langues nationales concerne tous les Béninois de façon générale et plus particulièrement tout citoyen âgé d’au-moins 15 ans des zones d’encrage où ces derniers connaissent d’échec au niveau de l’école classique, surtout celles reculées. Il est donc important de faire remarquer qu’un besoin crucial en alphabétisation se fait sentir dans ces zones. C’est en raison de cela que le Gouvernement de notre pays a pris l’engagement d’offrir une seconde chance à cette frange de la population et tranche d’âge déscolarisée ou pas du tout scolarisée.
Mes objectifs sont ainsi les suivants :
i) Œuvrer pour une alphabétisation fonctionnelle capable de sortir les jeunes du chômage et du sous-emploi ;
ii) Contribuer à la création de cadres adéquats d’alphabétisation dans les centres d’apprentissage ;
iii) Sensibiliser davantage les populations à accorder plus d’intérêt à l’alphabétisation en mettant à leur profit ses différents acquis ;
iv) Apporter un appui technique conséquent et une rigueur dans la formation des facilitateurs dans le sens d’une revalorisation du sous-secteur.
Quelles sont vos ambitions, vos rêves pour le sous-secteur de l’alphabétisation au Bénin ?
C’est une question capitale que vous venez de nous adresser. En réalité, comme nous le signalons à l’entame, le sous-secteur de l’alphabétisation fait face à de nombreux défis. Loin d’avoir la prétention, tel un super homme, de les relever à la fois, nous nous engagerons, ensemble avec les cadres de la DAPLN, le Cabinet ministériel, les partenaires techniques et financiers et tous les autres intervenants dans l’alphabétisation au Bénin, à maximiser les efforts de réussite des objectifs fixés.
Ainsi, nous travaillerons progressivement à élargir le champ d’apprentissage des langues nationales en identifiant bien d’autres langues à intégrer à la liste de celles déjà prises en compte, rendre possible et réalisable l’alphabétisation des cadres de l’éducation formelle dans nos langues maternelles ; en d’autres termes, que l’apprentissage des langues nationales soit admis à tout Béninois comme notre identité, notre patrimoine à sauvegarder. Ceci permettra une communication facile entre des parents non lettrés formellement et leurs familles sans difficulté. Nous mènerons aussi des réflexions dans le sens de l’organisation et de la mise en place d’un programme de suivi de la mise à profit des acquis de l’alphabétisation par les néo-alphabétisés.
In fine, que chaque Béninois s’épanouisse dans sa langue maternelle.
Quel est votre mot de la fin ?
L’alphabétisation dans les langues nationales devient une urgence sociale et socio-professionnelle en ce sens qu’elle constitue à la fois une deuxième chance qui sorte certaines couches vulnérables des situations d’insertion difficile et un instrument fonctionnel d’épanouissement aux mains de la couche professionnelle. Nous sollicitons donc du Gouvernement une attention particulière et soutenue à l’endroit de la DAPLN en vue de lui permettre, dans ses rôles régaliens, une réelle mise en œuvre de la politique gouvernementale en la matière. Par ailleurs, j’invite tous les Béninois à s’intéresser à apprendre, à écrire, à calculer, en un mot à réfléchir dans leurs langues maternelles.
Propos recueillis par Ulrich Vital AHOTONDJI