Bernard Comlan, au sujet de la masculinité positive : « Les enfants apprennent à participer au développement de la famille »

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La masculinité positive est un concept qui encourage non seulement le rôle complémentaire de l’homme à la femme dans la gestion des tâches domestiques, mais aussi l’éducation des enfants pour une harmonie conjugale. Dans cette interview, Bernard Comlan, psychologue et consultant en stratégies éducatives, éclaire sur le sujet.

Educ’Action : Que comprendre par masculinité positive ?

Bernard Comlan : Généralement, le thème de masculinité positive fait référence à une vision qui voit l’homme de sexe masculin comme quelqu’un qui participe au développement de la société, au développement du genre en contribuant à la protection, à la complémentarité des tâches dans le rôle que chaque personne peut jouer dans la société. Donc la masculinité positive, c’est cette manière de voir le sexe masculin pas seulement comme quelqu’un qui doit se présenter comme celui qui est déterminé, qui est courageux aussi, mais celui qui reconnaît une certaine émotivité.
D’habitude, la société conçoit que tout ce qui est féminin, tout ce qui est émotion est attribué à la femme. Alors, le concept de la masculinité positive vient dire que l’homme aussi a le droit de ressentir des émotions, de reconnaître cette émotion à son niveau. Également de se positionner comme quelqu’un qui est complémentaire dans le rôle que la femme joue dans la société.

Le concept de la masculinité positive fait-il référence à tous les hommes ou seulement à une catégorie ?

Il n’y a pas une catégorie d’hommes concernée. Il s’agit de l’homme en tant que sexe masculin. Mais quand on parle de la masculinité positive, la femme est aussi concernée dans le sens où elle a ce regard qu’elle doit porter sur l’homme. C’est pourquoi, la masculinité positive a cette dimension de verticale et d’horizontale. Puisque, quand l’homme veut se mettre dans le rôle complémentaire à la femme, certaines femmes sont réticentes à cela, à cause du poids de la culture. Donc, c’est cette dimension de l’horizontale où la femme aussi à cette participation dans la réalisation de ce projet qu’on va appeler « masculinité positive ». Pour autant, ce n’est pas dit qu’il y a une masculinité forcément négative. Non.
Si nous disons que l’homme en tant que maître, met sa force, sa vigueur, son courage en jeu, les stéréotypes au niveau de la culture disent aussi que dans le foyer par exemple, c’est l’homme qui doit assumer la charge du loyer. Ainsi, dans certaines cultures, le loyer est très sensible. S’il arrive par exemple, que compte tenu des circonstances, c’est la femme qui prend en charge les frais du loyer, cela ne veut pas dire que l’homme n’assume pas ses obligations. La masculinité positive va aussi dans ce sens. D’où, la dimension verticale pour que l’homme même puisse accepter certaines choses à son niveau, lâcher prise sur certains aspects de la culture qui malheureusement peuvent le mettre dans une certaine rigidité qui ne va pas vraiment arranger le développement de la société.
Donc, la masculinité positive, c’est cette complémentarité qui peut exister entre le rôle que le sexe masculin peut jouer auprès du sexe féminin et que le sexe féminin aussi peut jouer auprès du sexe masculin et qui devait être un rôle de complémentarité.

Comment peut-on reconnaître un homme qui s’inscrit dans la dynamique de la masculinité positive ?

D’abord, c’est cet homme qui s’engage à jouer son rôle d’homme auprès de la femme, son rôle de protecteur, de personne attentionnée, de contributeur dans les tâches que la société assigne naturellement à la femme. Par exemple, la femme doit rester à la maison, doit prendre soin des enfants, préparer à manger etc. Mais l’homme qui, au vu des situations, prépare, prend soin des enfants et les lave, de façon concrète fait la vaisselle, fait la lessive etc., s’engage dans la dynamique de la masculinité positive parce que la femme le fait mais quand l’homme trouve que c’est nécessaire de participer à cela, il s’y met aussi.
Il est également possible de reconnaître la dynamique de la masculinité positive quand l’homme s’accepte lui-même comme un être vulnérable à des moments donnés parce que la culture fait que c’est difficile pour l’homme de se sentir vulnérable. Mais se sentir vulnérable fait du bien aussi. Cela donne un certain lâcher prise et une satisfaction psychologique. Le fait de se sentir vulnérable aussi participe à la promotion de la masculinité positive. Donc, reconnaître la base et reconnaître chez un homme cet élan à la masculinité positive, c’est d’abord s’engager à être une aide pour la femme, être quelqu’un qui se refuse de s’engager dans la violence faite aux femmes. C’est la première dimension.
L’autre dimension, c’est s’accepter soi-même en tant que personne vulnérable, en tant que personne ayant des émotions et en tant que personne pouvant recevoir de l’aide de la part de la femme.

Comment faire pour que ce concept soit inclus dans notre contexte sociologique ?

Le changement est progressif. Cela veut dire que s’il y a deux (02) ou (03) personnes qui commencent à s’exercer à cela, progressivement la société va s’y faire. Aujourd’hui, des femmes conduisent, c’est progressivement que c’est rentrer dans les habitudes. Au départ quand vous voyez une femme mettre un pantalon, ce n’est pas accepté, mais à ce jour, la société a commencé à accepter. C’est de cette manière aussi, que si au niveau de chaque individu quelque part, chacun essaie dans son couple, son foyer, sa maison de prendre soin de l’autre, de son enfant quand il rentre du service alors que madame est occupée à faire autre chose, cela fait plaisir.
Quand toute la famille se réunit pour nettoyer la chambre, vous voyez le plaisir que cela procure de voir papa, maman, les enfants, dans une certaine dynamique. Cela donne aussi un élan aux enfants de comprendre qu’il n’y a pas forcément une tâche réservée à tel sexe mais qu’ensemble, nous pouvons construire la société.

Les parents sont-ils donc chargés de montrer cette voie aux enfants ?

Évidemment, les parents, c’est l’exemple. Les parents éduquent plus par l’exemple que par les paroles. C’est pourquoi un papa quand il rentre à la maison, et qu’il voit les choses désordonnées et posées au sol, au lieu de prendre son temps à se fâcher, il peut simplement ramasser et commencer à arranger. L’action est plus pédagogique de même que l’exemple.

Quels sont les bienfaits de la masculinité positive sur l’éducation des enfants ?

Les enfants comprennent dès le bas âge par exemple, si elles sont des filles, qu’elles ne doivent pas faire telle activité à cause de leur sexe, mais qu’elles ont la liberté de choisir les activités qui leur procurent beaucoup plus de bonheur, de joie. Dans une famille où l’élan de la masculinité positive est porté, c’est que les enfants apprennent déjà que peu importe leur sexe, ils peuvent tous participer au développement de la famille, de la société. C’est un aspect éducatif de la chose qui permet aux enfants non seulement d’apprendre, mais aussi de le communiquer à leurs progénitures dans le futur.

Quels en sont les avantages psychologiques ?

Quand un homme se rend vulnérable, il y a une libération psychologique à son niveau. La confiance en soi grandit. Il n’est plus dans l’intention de prouver qu’il doit rester fort parce qu’il est un homme. Cela lui évite aussi, des aspects dépressifs puisqu’il ne se met plus de pression. Au plan psychologique, la mise en pratique de ce concept contribue vraiment à la promotion de la santé mentale auprès des citoyens. Vivement que cette pratique soit insufflée à chaque famille, chaque individu pour que nous ayons une société en bonne santé.

Que dire pour conclure ?

La masculinité positive est l’œuvre de tout le monde. Chacun de nous qui peut y contribuer en s’engageant à promouvoir les valeurs humaines liées au genre. En tant qu’homme de sexe masculin, aider la femme, la protéger. Cependant, la femme aussi doit être ouverte pour recevoir de l’aide. C’est un autre aspect de notre société puisque certaines d’entre elles, à cause de la culture, ne peuvent pas accepter certaines choses mais elles doivent s’y résoudre car, cela relève du bien de tous.

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Propos recueillis par Gloria ADJIVESSODE

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