Depuis des jours, le sommeil s’est éloigné de nous, pauvres proies faciles et attaquables par l’ignoble Coronavirus. La peur comme de petits pains, assiège nos cœurs, notre vie à la résonnance continue des cas de décès ventilés ci et là, pire proche de nous. Alors que l’Espagne franchissait la barre des 767 morts, et l’Italie, désormais premier épicentre dans le monde avec des décès énormes, le Bénin, très loin, peut encore se réjouir avec les deux (02) cas de malades désormais portés à six (06) aux dernières nouvelles. Les conseils des Ministres se multiplient au sommet de l’Etat, pour fouetter la réflexion des mesures préventives qui s’enchaînent et distillent à longueur de journée, via les médias traditionnels, les canaux et médiums appropriés pour une large sensibilisation des populations vulnérables aux assauts du virus qui allègrement défie le monde.
Aux côtés des recherches biologiques, des innovations médicales en cours et des efforts techniques déployés à grande échelle contre l’ennemi commun, le spirituel s’invite aussi dans le débat, plutôt dans la lutte, se dressant comme une forteresse feutrée. Pour mon escapade de ce jeudi nuit, j’ai participé, curieux, à une séance de prière et de délivrance d’une église évangélique très loin de Cotonou, à Pahou. Sur des hectares, s’implantent ses fondations avec une horde de fidèles, chacun avec ses intentions du monde. Le premier responsable du ‘’coin’’, « PAPA » comme ils l’appellent affectueusement, a réussi, via ses séquences de prières debout, à apprivoiser trois monstres, sources de nos malheurs : le serpent, le dragon et le coronavirus. Pour la petite scène, les trois entités démoniaques qui ont pris corps et chairs à travers des fidèles (deux jeunes dames et une petite fille), qui, elles aussi, cherchaient la délivrance en ralliant ce lieu de culte, sont actuellement en mission de destruction massive des âmes au Bénin.
Raison de plus pour que la peur s’empare de chacun de nous. Heureusement que « PAPA », au milieu des prières de délivrance, a annoncé avec force que le monstre à trois têtes est vaincu sur la terre béninoise. Faut-il y croire ? Ne vous préoccupez surtout pas de ma foi à moi. Comme un bon reporter, je me suis juste évertué à vous faire le récit, moins dans les détails, de mon escapade nocturne.
Pour reprendre la ligne de cette réflexion, malgré nos peurs légendaires et latentes, les apprenants béninois ne jouissent point de congés anticipés de Pâques comme c’est le cas au Burkina-Faso, au Niger, en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire, en France… Contre plusieurs avis certainement, les autorités du pays ont fait l’option de garder ouvertes les portes des écoles, lycées et universités pour le bon déroulement des cours et activités académiques. D’ailleurs, le ministre de la santé, aux multiples préoccupations dans ce sens, a apporté le son de cloche du gouvernement à savoir que le plus important, à l’étape actuelle, est « de nous assurer que nos enfants puissent effectivement respecter ces règles d’hygiène, notamment le lavage systématique des mains à l’eau et au savon ». Et pour définitivement, convaincre les parents d’élèves qui s’inquiètent encore de la non-fermeture et donc de la présence imminente du virus en milieu scolaire, l’autorité pose le diagnostic qu’à « regarder très bien, la propagation de ce virus part d’abord des personnes adultes. » En conclusion, le système éducatif n’est donc pas inquiété par ici, et mieux, il peut continuer à fonctionner et à tourner.
De l’analyse de la situation actuelle par des moins sachants ou par des profanes de la pandémie, le Bénin devrait expressément mettre l’école en berne à l’instar d’autres pays où le mal sévit avec un nombre important de personnes infectées. Seulement, on ne doit pas perdre de vue qu’à l’heure actuelle, aucun béninois n’est encore détecté comme porteur du virus. Les deux cas de malades identifiés sont des citoyens d’autres pays : un Burkinabé et une Allemande en séjour au Bénin. Dès lors, il revient à chacun et à chacune de rester lucide, d’être moins alarmiste pour ne pas nous détourner de l’essentiel. Notre cible est bien connue : le coronavirus. Nous ne pourrons vaincre le mal dans la panique, mais avec l’intelligence. Les mesures de prévention sont prises et largement distillées. Il appartient à chacun de les observer strictement et avec rigueur, sans verser dans la légèreté et le discours vaseux. Car l’ennemi est encore devant nous.
Serge David ZOUEME, Spécialiste de l’éducation, Administrateur du patrimoine culturel