Cyrille Djossin, directeur de l’EPP Gourou-Bansou C, à propos de la scolarisation à Gogounou : « C’est surtout les filles qui sont envoyées à l’école »

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La scolarisation des enfants demeure un défi dans certaines parties du Bénin. Dans le nord du pays, de nombreux efforts sont consentis pour que tous les enfants aillent à l’école. C’est le cas dans la commune de Gogounou située à 492 Km de Cotonou. Dans cet entretien, Cyrille Djossin, directeur de l’EPP Gourou-Bansou C, expose certaines facettes de l’éducation dans sa circonscription scolaire.Bonne lecture.

Educ’Action : Où étiez-vous avant d’être affecté ici ?

Cyrille Djossin : J’étais au sud, précisément dans la circonscription scolaire de Tori Bossito. J’étais dans une école où j’ai fait douze (12) ans. C’est dans ma treizième année qu’on m’a envoyé directement au nord où j’ai atterri pour la première à Gogounou. Je suis dans ma deuxième année de service.

Que dire de votre école ?

Nous sommes dans un complexe composé de trois groupes : les groupes A, B et C. Je suis le directeur du groupe C ayant en son sein six (06) classes dont quatre (04) sont officiellement autorisées. Il s’agit de CI, CP, CE1 et CE2. Depuis deux années l’école manquait de directeur. C’est cette année, à mon arrivée, que j’ai rédigé la demande d’extension. S’il plaît à Dieu et si tout va bien, l’année prochaine, les deux classes restantes que sont CM1 et CM2 seront officiellement ouvertes aussi.

Quel est l’état des lieux en matière d’enseignants ?

Dans mon école, nous avons trois (03) AME et un(01) ACDPE. Moi-même, je suis ACDPE et suis également le maître des élèves de la classe de CM1 et CM2. C’est une classe jumelée. Seules les classes de CM1 et CM2 sont jumelées.

Comment se présentent les effectifs ?

Du CI au CE2, la moyenne c’est 60 par classe. Plus précisément, au CI nous avons plus de 40 élèves, au CP nous avons 97 élèves, au CE1 et CE2 plus de 50 élèves chacun. Dans la classe jumelée de CM1-CM2, nous avons 55 élèves. Dans les classes, il y a plus de filles que de garçons. Généralement, les parents n’envoient pas trop les garçons à l’école. Ils préfèrent les garder pour le pâturage et les champs. C’est surtout les filles qui sont envoyées à l’école.Dans ma classe de CM2, j’ai 26 candidats parmi lesquels il y a 20 filles.

Qu’avez-vous fait pour avoir autant d’apprenants ?

Les élèves étaient là avant mon arrivée. Je n’ai pas fait beaucoup d’efforts. Si les élèves continuent de fréquenter cette école, je pense que cela est dû aux efforts de mes prédécesseurs.

Qu’en est-il de la collaboration avec les autres enseignants et directeurs dans le complexe ?

Dans notre école ici, nous collaborons très bien, nous travaillons dans une ambiance conviviale. Je ne travaille pas seul, je suis toujours avec mon collaborateur.

Qu’en est-il de vos difficultés ?

Pour moi, c’est plutôt un choc. Je ne comprends ni le Bariba, ni le Peulh par exemple. Je suis de langue Fon. Il est vrai que le français est notre langue officielle, mais à des moments donnés, certains élèves pour comprendre le cours ont besoin qu’on le leur explique dans leur langue maternelle. Cela, pour que le message les pénètre. A ce niveau, j’ai tellement de difficultés. Je fais parfois des gestes mais sans grands résultats. Il faut dire aussi que le climat ne me facilite pas les choses. Qu’il fasse froid, chaud ou quand il pleut, chaque saison est difficile.
Pour le déroulement des activités pédagogiques, j’ai moins de problème avec les grands. Mais avec les petits, c’était difficile dans l’école où j’étais l’année dernière.

Quelles différences faites-vous entre la scolarisation au sud et au nord du Bénin ?

Les élèves ici ne se sont pas inscrits tôt à l’école. Par conséquent, nous avons des élèves de 13 ans, 14 ans, 15 ans au CI. Si bien qu’au CE2. Ils ont des corpulences de papa et de maman. J’ai constaté aussi que les parents ne se préoccupent pas trop des études. Ce qui fait qu’ils n’aiment pas investir dans l’instruction de leurs enfants. Vu que l’UNICEF prend en charge les enfants du CI et du CP, et qu’il y a aussi la cantine scolaire, alors l’enfant est équipé, vêtu, et nourri. Par conséquent, les parents délaissent les enfants. A partir du CE1, difficilement on trouve un cahier chez un enfant, puisqu’au CI et au CP, l’UNICEF et l’Etat pourvoient aux besoins scolaires et nutritionnels des enfants.
Pour les cantines, nous demandons aux parents de donner 2500f pour neuf mois, ce qui devrait faire plus ou moins 13f par jour. De nombreux parents ne donnent pas. Alors que pour manger à la maison les parents dépensent plus que cela. Dans mon école au sud, les parents donnaient leur contribution et ajoutaient les condiments et du bois pour faire la cuisine.

Quel soutien souhaiteriez-vous qu’on vous apporte ?

Notre souhait c’est que le gouvernement engage des cuisinières, à l’image de ce qui se fait avec les enseignants. Les cuisinières se plaignent beaucoup car elles ne reçoivent rien malgré leurs efforts. Je me demande aussi si cela est possible, mais ce serait bien si les ONG et autres pouvaient collecter les 2.500 en question. Ainsi, lorsque nous venons à l’école, nous verrons les enfants manger et nous nous occupons des activités pédagogiques. Nous ne serons plus exposés aux plaintes parce que les parents qui paient pour l’alimentation de leurs enfants s’offusquent de ce que les enfants dont les parents n’ont pas versé leur contribution aient aussi droit aux repas. Si la mairie peut aussi s’en occuper, nous venir en aide sur ce point, ça serait bien.

Qu’en est-il de votre traitement ?

Notre souhait c’est que les avancements soient faits à temps. Que l’on gagne le salaire correspondant au grade correspondant et au moment correspondant. Les actes d’avancement viennent en retard, et ensuite le salaire vient en retard. L’Etat a fait beaucoup d’efforts pour que les écoles soient pourvues en enseignant, mais il reste encore à faire.

Que dire de votre collaboration avec l’association des parents d’élèves ?

Nous avons une Association des Parents d’élèves (APE). Le bureau APE est toujours à nos côtés. Ils nous aident beaucoup pour la sensibilisation des parents sur plusieurs plans. C’est le cas pour les parents qui n’aiment pas investir dans la scolarité de leurs enfants. Ils nous aident à faire la collecte des 2500 f auprès des autres parents.

Propos recueillis par Adjei KPONON

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