L’Education Physique et Sportive (EPS), à l’instar d’autres disciplines du Secondaire, est en proie à des difficultés qui sapent les efforts des enseignants. Dans cette thématisation, Educ’Action met le curseur sur la différence entre l’EPS et le sport avec un point d’honneur aux compétences enseignées.
L’Education Physique et Sportive (EPS), a toute sa raison d’être dans l’enseignement et reste une matière importante comme les autres. Dans l’opinion publique, c’est le sport qui est enseigné dans les établissements publics aussi bien du primaire que du secondaire. Mais la nuance est vite établie par l’enseignant de l’EPS, Ulrich Lankpoédja qui clarifie : « Nous n’enseignons pas le sport mais plutôt l’Education Physique et Sportive (EPS), parce qu’entre l’EPS et le sport, il y a une grande différence. » Selon ses explications, la différence réside dans le fait que le sport est toute activité physique motrice codifiée et institutionnalisée pouvant donner lieu à des compétitions suivant un règlement bien défini. « On parle de la motricité parce qu’avec le sport, on se déplace, le corps est en mouvement. C’est codifier parce qu’il y a un code qui est dans ce contexte, le règlement qui régit l’activité. Il y a des institutions comme les fédérations et comités qui gèrent le sport », fait-il savoir. Par contre, poursuit-il, l’EPS est une discipline d’enseignement au même titre que les autres matières qui permet aux apprenants, d’avoir des notions de base sur les activités physiques et sportives. Ici, ce sont des notions pédagogiques avec des objectifs variés qui sont enseignées aux apprenants. Enseignant d’EPS au CEG Koudo et au CEG Agamè dans la commune de Lokossa, William Tognihuidé renchérit que l’EPS joue un rôle significatif dans le système éducatif d’un pays pour plusieurs raisons essentielles allant d’abord du développement physique des élèves à leur bien-être émotionnel et social. L’importance de l’EPS dans le système éducatif, souligne-t-il, c’est qu’il participe à l’éducation à la citoyenneté, à l’apprentissage des compétences de vie.
L’enseignant d’EPS Ulrich Lankpoédja
Les notions enseignées aux apprenants en EPS
Au primaire comme au secondaire, l’enseignement de l’EPS dans les écoles publiques, vise des objectifs très précis. L’enseignant d’EPS Ulrich Lankpoédja renseigne que l’objectif de cette dernière, est de permettre dans un premier temps à l’élève, d’assurer sa propre sécurité et celle des autres, d’entretenir sa santé, de développer l’image et l’estime de soi pour construire sa relation avec les autres. Elle vise la recherche du bien être de la santé et de la forme physique et doit amener l’élève à bâtir une image positive de son corps. « Par la pratique de l’EPS, on apprend à l’élève à développer une certaine culture. Par exemple, aimer l’autre tel qu’il est, coopérer avec son prochain et cela permet aussi d’éviter le stress. La finalité de l’EPS, c’est de former un citoyen cultivé, lucide, autonome, physiquement et socialement éduqué », précise l’enseignant de l’EPS. C’est d’ailleurs pour cela que les notions développées sont toujours en lien avec les compétences à mettre en œuvre chez l’apprenant, rassure l’enseignant. Pour ce qui concerne les sports collectifs, l’enseignant laisse entendre que ce sont les notions de coopération qui sont développées avec les enfants. « Les joueurs d’une même équipe doivent s’entendre pour marquer plus de but à l’adversaire et empêcher ce dernier de leur marquer de but. Il y a les notions d’attaque, de défense, de passe, de déplacement, de réception, de tire, de réplique défensive, autant des notions. Mais en dehors de cela, nous développons également les notions de la santé, d’estime de soi », fait-il savoir. Invité à se prononcer sur la méthode de transmission du savoir en EPS, l’enseignant William Tognihuidé renseigne qu’il arrive d’utiliser des supports vidéo pour montrer réellement à l’élève ce qu’on attend de lui. Nous utilisons aussi, informe-t-il, des situations d’apprentissages les moins complexes dans le but de faciliter l’apprentissage aux élèves. « Mais il faut aussi noter que malgré tous ses efforts, il arrive des fois que des élèves éprouvent énormément de peines dans la réalisation des exercices. Dans ce contexte, nous faisons recours à la pédagogie différenciée, à la méthode de remédiation pour essayer de sortir du lot les quelques élèves qui ont particulièrement des difficultés », fait remarquer l’enseignant William Tognihuidé.
L’EPS et les apprenants, un lien solide…
Contrairement à certaines matières qui constituent des bêtes noires que la plupart des apprenants fuient, l’EPS connaît un certain engouement de la part des élèves. « On constate que les enfants qui ne viennent pas souvent aux autres cours, sont toujours présents au cours de l’EPS avec effectif au complet », fait observer l’enseignant Ulrich Lankpoédja. Cela se justifie, à en croire ce dernier, par le fait que les enfants savent que c’est la santé avant tout et qu’il faut être en bonne santé pour pouvoir suivre les autres cours. « Nous nous occupons plus de la santé de l’élève, et de son bien-être. Les enfants ont compris cela et aiment trop l’EPS. Pour eux, c’est le seul moment dont ils disposent pour se distraire et s’amuser », fait remarquer l’enseignant Lankpoédja.
…. que mêmes les difficultés peinent à dissoudre
Discipline tant appréciée chez les élèves, l’EPS est confrontée à plusieurs difficultés qui entravent la transmission du savoir. Il s’agit, énumère l’enseignant William Tognihuidé, de la gestion de l’effectif pléthorique qui constitue un problème majeur, le manque d’infrastructures adéquates pour faciliter l’apprentissage et les difficultés liées à l’identification des situations-problèmes adéquats pour pallier les difficultés rencontrées par les élèves au cours de l’apprentissage. « La plupart des établissements secondaires en général n’ont pas le matériel et les infrastructures adéquats. Par exemple, pour enseigner le basket, il faut nécessairement avoir un terrain de basket mais combien d’établissements disposent d’un terrain de basket en bonne et due forme ? Nous sommes parfois obligés de nous adapter », se résigne l’enseignant Ulrich Lankpoédja. A son collègue William Tognihuidé d’ajouter : « Il faut dire que l’EPS, avant d’être pratique, est d’abord théorique. Pendant la phase théorique, il revient à l’enseignant d’expliquer, à travers des consignes simples, précises, concises par des opérations motrices et des indicateurs de réussite, le geste moteur à réaliser par l’élève dans le but de faciliter l’apprentissage à ce dernier. Mais nous constatons très souvent que malgré les efforts des enseignants, certains élèves n’arrivent toujours pas à réaliser les gestes recommandés. »
Un besoin de 645 enseignants à combler en EPS
« Le Bénin a, en tout, besoin 645 enseignants en EPS pour couvrir totalement le territoire. Mais nous n’en avons pas. A priori, on peut voir que c’est vraiment élevé. Mais nous avons 936 établissements scolaires. Alors, quand on prend le ratio, on se rend compte que cela fait un peu moins d’un enseignant par établissement en réalité. C’est-à-dire que malgré ce nombre élevé, depuis l’avènement du programme des AME, il y a eu un grand effort qui est fait pour arriver en moyenne à pratiquement moins d’un enseignant d’EPS par établissement scolaire. » Ces données du consultant de la plateforme EducMaster, Dr Abdou Wahidi Bello renseigne sur le déficit d’enseignants en EPS auquel est confronté le système éducatif béninois. Cette situation, explique-t-il, est liée au fait que le Bénin n’a pas formé suffisamment d’enseignants en EPS et pendant longtemps, plusieurs classes sont restées sans enseignants dans cette discipline.
Réalisation : Estelle DJIGRI, Enock GUIDJIME & Edouard KATCHIKPE