Eloge du don

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Beaucoup de ceux qui m’ont lu la dernière fois ont protesté et soutenu que le don est la plus belle chose au monde. Il dépasserait, semble-t-il, la justice car il est amour ou charité. On ne peut alors que se féliciter, face à la très grande prodigalité de la classe politique béninoise. D’aucuns diront : tiens, ils sont si riches ? Moi je répondrais avec vigueur : tiens, ils sont si généreux !
En effet, nos écoles sont envahies, en ce début d’année par tous ces curieux mécènes qui dans des mises en scènes colorées, semblent tordre le cou à un adage célèbre en disant : « donner du poisson plutôt qu’apprendre à pécher ». En même temps, on ne peut nier que ces dons divers de kits, de tables et autres matériels, sont salvateurs dans une rentrée morose, conséquence d’une éternelle pauvreté.
Oserait-on se gausser ou gloser de cette soudaine générosité qui semble se faire dans une belle pagaille sans concertation, sans critères évidents et avec la seule volonté affichée de faire beaucoup de bruit. Ce n’est pas sûr que l’effet soit très important et véritablement porteur pour des activités faites en rang dispersé et dans une belle pagaille.
Ces dons qui vont de quelques dizaines de sacs d’écolier à des cadeaux plus importants sont faits au mépris de tout critère, de toute règle. Deux éléments semblent essentiels : Être un personnage local ou national et vouloir effectuer un don. A mon avis, à ces deux critères doivent s’ajouter un autre fondamental à savoir l’intervention des structures centrales et déconcentrées de l’éducation pour planifier et harmoniser.
OUI ! Il faudrait planifier cette activité au niveau des directions en charge de la planification et leurs démembrements afin d’harmoniser. Chaque intervenant devrait s’annoncer, présenter son projet de don ; répondre à des critères précis de qualité et d’efficacité voire de pérennisation dans un appui plus structurant de la communauté. Sinon, on impose aux populations et les oppose ! C’est donc d’une planification concertée et efficace du don qu’il s’agit afin que certains ne reçoivent pas plusieurs fois tandis que d’autres en souffrent. Ainsi par exemple, dans un contexte où l’Etat et ses partenaires voudraient bientôt partager 28 000 kits, on comprend la pagaille et les doublons. Mieux, certains donateurs pourraient convertir leurs dons en besoins plus importants comme les voyages de sables, les feuilles de tôles et autres ciments utiles en ce moment. La DPAF et surtout les mairies doivent recevoir plein pouvoir pour réguler cet exercice dont le caractère souvent ponctuel et aléatoire n’est pas toujours efficace.
Certains esprits chagrins vont s’étonner qu’on puisse remettre en cause un tant soit peu des dons qui participent de la solidarité et du soutien, mais qui ne prendront pas au fil du temps, la dimension d’efficacité et de pérennité avec l’école et la communauté. En réalité, l’un de nos plus grands problèmes se situe là : Le manque de discernement face aux dons et aux donateurs car dans nos milieux, cela renvoie à nos valeurs de solidarité et d’entraide sans arrière-pensée.
C’est ainsi que nous avions pris l’habitude de recevoir de ces dons de la communauté internationale sans réelle discernement, sans choix de nos partenaires. Celui-ci vient et propose d’aider l’école à faire ses curricula : on lui fait confiance et lui donne les clés de la maison. Il s’installe. D’autres veulent s’occuper de notre santé ; de la qualité de nos enseignants qu’il faut dégraisser, on lui dit merci. Et nous avions fait cela pendant des décennies, faisant confiance et pire, nous soumettant à ces curieux donateurs ! Aujourd’hui, nous nous trouvons « gros Jean comme devant » ayant compris que nos amis servent surtout leurs intérêts et que nous ne prenons pas assez de temps et de rigueur de leur indiquer nos désirs, nos besoins et nos valeurs. Maintenant, tout est à refaire en grande partie. Sachons nous expliquer et nous impliquer et surtout soyons conscients et fermes sur nos intentions et nos actions. J’espère que j’ai pu expliquer pour les bien-pensants, que le don est bon !

Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

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