Eros et Thanatos

  • 0
  • 152 views

J’ai eu le plaisir et l’honneur d’assister à une réunion de partage sur la dépression post-partum c’est-à-dire ce trouble psychologique qui survient chez plusieurs femmes après l’accouchement. Je me suis retrouvé dans un milieu où, évidemment les femmes étaient plus nombreuses et plusieurs ont évoqué leurs expériences et les vécus traumatisants qu’elles ont subis.
En ce début d’année nouvelle où il s’agissait de célébrer la naissance d’un nouveau cycle de vie de 365 jours pleins d’attentes et d’espoirs pour chacun, j’ai compris à quel point, il est utile de magnifier la vie humaine dans ce qu’elle a de plus précieux. Cela signifie, qu’en même temps, il faudrait éloigner de chacune des femmes qui ont donné la vie, à la fois tout traumatisme lié à chaque enfantement et se pencher sur celles qui en sortent avec des séquelles plus importantes. Celles surtout, qui pensent que donner la vie, cet acte ultime d’amour, c’est se donner à la mort : cette contradiction curieuse et paradoxale que le psychanalyste Sigmund Freud avait traduit par la dialectique de Eros, pulsion d’amour et de vie et Thanatos, pulsion de mort. J’ai été vraiment conquis. Mais trois points qui participaient de l’incompréhension de l’univers masculin par nos femmes modernes, m’ont étonné.
La première, c’est que je reconnaissais que les femmes nous aiment, mais elles pensent que l’enfantement est si personnel qu’elle ne nous concerne pas ! En réalité, il y a une première situation naturelle qui fait que c’est la femme qui enfante et cela on ne peut jusqu’à présent, rien y faire. Et pourtant, les femmes nous en veulent pour ça et pensent très largement à tort, que nous ne pouvons ni la vivre, ni la comprendre. Si, on pouvait se passer la grossesse entre l’homme et la femme, les femmes seraient surprises du nombre d’hommes qui les aideraient. Le fait de ne pas être celui qui accouche et pourtant être responsable de deux vies présente et à venir crée aussi un traumatisme en l’homme.
Je me souviens de notre premier bébé ma femme et moi. Pendant qu’elle était dans des mains expertes et habituées, je vivais un véritable moment d’angoisse, ne tenant pas en place ; allant constamment interroger et agacer les sages-femmes. Pourtant un grand ami me soutenant et m’apaisant ; riant de mon spectacle de folie passagère. A un certain moment, n’y tenant plus, je courus dans des toilettes et me déchargeait le colon d’un caca nerveux qui remplit le WC. Je restais là, pendant un long moment et sortit tremblant de peur et d’espoir.
Je revins, on m’annonça l’heureuse nouvelle de la naissance de l’enfant. Je sautais, soulagé et encore plus fou, au cou de mon ami ! Cela continua et chaque naissance d’un de mes enfants, me mettait en transe.
Ma deuxième remarque porte sur une affirmation étonnante et partagée par la plupart des femmes présentes qui considèrent que les hommes africains n’aiment pas ou mieux ne savent pas aimer. A la limite, on les épouse pour procréer et à aucun moment, il n’y a pas d’amour. Cette terrible vision est surement nourrie par les novelas et certaines attitudes occidentales vues de loin où on s’embrasse à tout moment s’avouant à satiété un amour tourmenté et comédien. L’amour dans nos milieux, même traditionnel, s’exprime patiemment, fortement et sereinement dans le soin qu’on prend de sa famille.
Enfin, les deux psychologues intervenants de qualité et la conviction m’avaient laissé sur ma faim en n’invoquant pratiquement pas le syndrome de la dépression post-natale chez les hommes qui, face à leurs devoirs et leurs charges peuvent sombrer dans un mal être.
Pour terminer, je me demande si mes différentes réactions ne sont pas à la fois l’expression d’une certaine envie mêlée de jalousie face à nos femmes qui pour la plupart, passent le cap de l’enfantement dans la souffrance mais se retrouvent sereine et merveilleuse à nos côtés. Je voudrais terminer en donnant l’exemple de ma tendre moitié à qui je voue admiration et respect pour un acte de bravoure qui me rappelle que, quels que soient les moments difficiles, je peux compter sur elle. Loin d’elle en occident, elle s’est retrouvée dans une situation où elle devait accoucher. Elle sollicita plusieurs personnes qui n’étaient pas disponibles. Elle prit alors sa voiture et un nécessaire, s’en alla à l’hôpital, accoucha et rentra à la maison le soir avec son bébé ! Oui, chaque femme est merveilleuse et surhumaine ! C’est pourquoi, nous nous agenouillons à chaque fois devant elles pour les aider à porter le fardeau de la vie.

Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

Bernard Comlan, psychologue clinicien, à propos de la tontine sexuelle : « Ce sont les apprenants dont la famille est monoparentale »
Prev Post Bernard Comlan, psychologue clinicien, à propos de la tontine sexuelle : « Ce sont les apprenants dont la famille est monoparentale »
JME 2025 : L’intelligence artificielle mise en avant
Next Post JME 2025 : L’intelligence artificielle mise en avant

Laissez un commenntaire :

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Vous n'avez pas le droit de copier ce contenu !