Une question : Avons-nous la capacité d’entreprendre ! La quasi-totalité de nos descendants rêvent de carrières formidables dans l’administration publique où en plus du gite et du couvert, on a la sécurité de l’emploi !
Mais entreprendre ? Cette idée ou proposition est pleine d’aléas surtout que toute la tradition la présente comme le coup de génie d’un individu seul qui fait un business plan et trouve un financement pour développer la vente d’un gari aromatisé vers une destination occidentale. On l’encense, il est l’exemple et passera des dizaines d’années à chercher à plaire à ses maîtres ! Bof, ce n’est pas du tout l’entreprise.
D’un autre côté, beaucoup pensent que l’entrepreneur devrait être nécessairement bardé de diplômes et respectueux de toutes les règles éthiques. En réalité, l’entreprenariat est plus développé dans nos contrées rurales et auprès de celles et ceux qui n’ont jamais aspiré à la fonction publique. C’est donc le petit peuple, fait surtout de femmes qui entreprennent au bord des places publiques de campagnes ou de villes et dont le dynamisme nourrit hommes et enfants ! En même temps, elles font face aux pesanteurs sociales et administratives, voire intellectuelles qui ne leur permettent pas de démultiplier leurs activités !
Je me souviens de deux dames célèbres dans le quartier de wologuèdè ; l’une vendant du moyo et l’autre de la viande frite très prisée où, pour acheter, on faisait le rang. Elles auraient pu ouvrir des succursales dans tout le Bénin. Elles ont acheté des meubles et immeubles mais avec beaucoup de craintes, car personne ne leur avait jamais expliqué qu’elle pouvait faire mieux ! Les familles hargneuses et l’administration fiscale manquant de pédagogie, ont mangé le reste de leur énergie. L’une est morte et le commerce bat déjà de l’aile, l’autre semble avoir carrément fermé, je ne sais pourquoi. Elles ont toutes compté des millions de francs CFA, mais elles n’ont jamais vraiment compris qu’il existait aussi des millions de dollars ou d’euros !
Ces femmes vertueuses ont élevé des dizaines de personnes et contribué à scolariser plusieurs autres. Plusieurs personnes seront étonnées par mes exemples ! J’aurai pu citer de grands capitaines d’industrie à la manière de Dangoté au Bénin. Mais je pense que l’objectif de l’entreprenariat dans nos pays consiste à être capable de vivre décemment sinon, on rentre dans d’autres aspirations, par exemple politiques dangereuses.
De nos jours, beaucoup de personnes se tournent principalement vers deux filières entrepreneuriales porteuses : la politique et la religion c’est-à-dire, membres des partis politiques comme ascenseur aux postes de la fonction publique ou pasteur formé en trois ou six mois avec un bagou incroyable. La morale est-elle là car, je compte vous parler d’une entreprise encore plus florissante développée par nos jeunes filles et qui va vous paraître immorale. Mais les deux premières sont-elles morales ?
En effet, face aux nécessités de la vie, beaucoup de jeunes filles ont découvert un filon inépuisable qui a juste besoin d’un portable. Dans un contexte d’oisiveté totale faite de fêtes, de statut sur les réseaux sociaux et de balades à la plage, ces filles ont mis en place un commerce rentable qui leur permet de payer plusieurs tontines de milliers de francs en semaine. La technique consiste à se constituer un réseau fait de copains, de simples admirateurs et de tontons multiples.
Le modus operandi est le même : cc, comment tu vas ? Ta réponse t’amène dans un engrenage fatal où on te demande juste une petite somme soit 1000f. Ceci sera répété sur plus d’une dizaine de personnes par jour avec moult promesses, menaces, déstabilisation, voire pleurs etc. jusqu’à ce qu’excédé ou ému, tu envoies quelque chose. Chaque jour, elle se fait un pécule au détriment de plusieurs nigauds. Mais est-ce de l’entreprise ou de l’arnaque ? Quid alors du pasteur ou du petit politicien !
Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe
