Fin du mandat des recteurs des Universités Nationales du Bénin : Enseignants et étudiants plaident pour le retour des élections rectorales

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Les dernières élections rectorales au profit des Universités Nationales du Bénin remontent aux mois de novembre et décembre 2017. Après trois (03) ans d’exercice, le mandat des équipes rectorales des deux (02) universités pluridisciplinaires du Bénin : l’Université d’Abomey-Calavi et l’Université de Parakou, est arrivé à terme depuis le 17 décembre 2020 avec pour effet de conséquence l’élection de nouvelles équipes. Ce qui, pour l’heure, ne semble pas être d’actualité avec la prorogation sous-entendu du mandat des recteurs en fonction. Une situation qui a tout l’air d’une impasse avec ici les réactions des enseignants d’universités et des étudiants au micro de Educ’Action.

Ce jeudi 21 janvier 2020, c’est une affluence rare qui se note au niveau des bâtiments qui côtoient l’amphithéâtre A1000 de la FASEG de l’Université d’Abomey-Calavi. Etudiants en costumes et cravates, parents d’étudiants sont tous mobilisés pour la phase des soutenances de mémoire programmées pour les sortis de l’UAC. Pas trop loin, s’observent des lignes de motos et de véhicules garés, jouxtant le nouveau bâtiment de la FASHS et de la FLLAC. Le personnel ici est bien au poste pour les tâches administratives. L’horloge affiche 13 heures passées de 35 minutes. De l’intérieur du module 3, la voix de l’enseignant se fait entendre, lui devant des étudiants attentifs qu’on peut facilement percevoir au travers des grilles qui servent de porte d’entrée à la salle. Côté infrastructure, la voie conduisant à l’amphi Idriss Déby Itno, en chantier, fait progressivement peau neuve. Seulement, cette ambiance des grands jours cache une inquiétude chez des enseignants et étudiants : l’avenir de la démocratie universitaire.

Une marche démocratique enrhumée

20 septembre 2018, la décision est tombée. Le décret n°2018-441 portant mesures transitoires à la mise en œuvre de la réforme de la gouvernance des Universités Publiques du Bénin sort de la Marina et vient suspendre les élections des dirigeants des universités publiques du Bénin. La raison évoquée par l’exécutif : la mise en place prochaine du Conseil National de l’Education (CNE), qui va réguler la gouvernance dans les universités publiques. Quelques mois après, d’autres décisions suivent. Il s’agit du décret n°2019-042 et des arrêtés n°041/MESRS/DC/SGM/SP-CAB/001 SGG19 et n° 042/MESRS/DC/SGM/SP-CAB/002 SGG19 de janvier 2019 qui nomment de nouveaux chefs d’établissements. Ce fut l’étonnement général couplé à une vague d’interrogations dans le rang des universitaires. Des enseignants et étudiants sont, du coup, remontés sans pouvoir changer grand-chose au cours de l’histoire. Les nouveaux responsables d’entités promus du haut ont pleinement pris service. L’eau a coulé sous le pont et un an (01) plus tard, précisément le 21 janvier 2020, les 29 membres du CNE sont installés. Depuis lors, les membres de la communauté universitaire n’ont pas vu les lignes bougées jusqu’au 17 décembre 2020, date de fin du mandat des recteurs élus en 2017. Que d’inquiétudes, d’interrogations voire de frustrations au sein des enseignants d’université, étudiants et autres acteurs universitaires !

Encore un pas pour restaurer les valeurs démocratiques dans nos universités nationales…

« Le mandat des recteurs élus en 2017 est arrivé à terme depuis le 17 décembre 2020. Les syndicats des enseignants du supérieur n’ont pas attendu la fin des mandats. Depuis fin septembre 2020, nous avons commencé à attirer l’attention de nos autorités sur la nécessité de rouvrir le processus démocratique dans les universités ». C’est par ces explications que Gabin Tchaou, secrétaire général du Syndicat Autonome de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (SYNARES), plante le décor. Rencontré devant son laboratoire, l’enseignant de l’Institut de Géographie et d’Aménagement du Territoire (IGATE) de l’Université d’Abomey-Calavi est très préoccupé. Entre suivi des travaux des étudiants, suivi des travaux de recherches au laboratoire et autres, il reste inquisiteur sur la question. « Pas plus tard qu’il y a deux semaines, le SYNARES a sorti un communiqué pour rappeler aux autorités du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS) et au Gouvernement, la nécessité pour nous de retourner à la démocratie universitaire par les élections des recteurs », lance-t-il, assis sur une table-banc. Vêtu de sa tenue locale de couleur kaki, il prend le temps de développer les origines de cette situation comme déjà évoquée. Même son de cloche à l’Université de Parakou, deuxième université pluridisciplinaire du Bénin. C’est Fortuné Omer Alapini, secrétaire général du Syndicat des Enseignants-Chercheurs de l’Université de Parakou (SECUP), qui se prononce au micro de Educ’Action sur le même sujet. « Leur mandat est arrivé à terme. Des élections devraient déjà avoir eu lieu depuis un ou deux mois », affirme le SG dans sa tenue locale aux motifs multicolores. Pour lui, cette situation constitue une menace pour la démocratie universitaire et laisse ainsi planer des doutes sur les intentions et ambitions du gouvernement, en référence à la nomination des chefs d’entités. « Nous avons compris que le gouvernement compte étendre cette démarche à la désignation des recteurs », soutient le SG du SECUP.
Poursuivant ses explications, il est revenu sur les impacts d’une intrusion politique dans la vie académique. « Lorsque la politique finit par envahir l’université, il y a quelque chose d’impondérable, d’irrationnelle, qui finit par ébranler l’existence normale des institutions universitaires. Les institutions universitaires ont leur propre réalité et ne peuvent être assimilées à de simples structures administratives », explique l’enseignant-chercheur d’une voix basse. Ludger Zannou, président de l’Union Nationale des Scolaires et Etudiants du Bénin (UNSEB), met directement les pieds dans les plats : « c’est un recul pour la démocratie et les organisations estudiantines sont contre toute nomination. Quand un mandat fini, il faut que des élections soient organisées pour permettre à une autre équipe de s’installer ». En attendant, les universités continuent de tourner, à quel prix ?

Recteurs, pieds et mains liés ?

A la question de savoir dans quel état les recteurs vont exercer leurs fonctions dans de pareille circonstance faite de violation des normes et de jurisprudence, la réponse de Dr Gabin Tchaou est claire. Le temps de se redresser de son siège, puis il confie : « celui qui a fini son mandat, qui n’est pas remplacé et à qui on ne dit pas ‘’vous êtes reconduits par intérim pour le moment’’, vous pensez qu’il aura les coudées franches pour travailler comme s’il avait la légitimité de ses pairs par élection ? ». La réponse ne se fait pas attendre : « il va fonctionner à tâtons. Il va se dire ‘’je fais juste le minimum. Il ne faudrait pas que je pose un acte et qu’on me le reproche après’’. Il n’aura pas les mains libres pour travailler parce qu’il serait à ce moment là dans un vide. Quand c’est comme cela, vous devez savoir que vous marchez sur des œufs ». Pour Omer Alapini, il y a un vide juridique. « Ce sont les réformes qui traînent à prendre corps. Quand on compare l’UNA et l’UNSTIM face à l’UP et à l’UAC, nous sommes dans un dualisme institutionnel en termes de mode de désignation des recteurs », observe-t-il. Mais pour l’heure, il faut parer au plus pressé. Ainsi, estime-il, il faut que les institutions universitaires continuent de fonctionner. « Même s’ils sont arrivés à la fin de leur mandat, on ne peut pas accepter qu’il y ait un vide institutionnel », conclut-il. Vide institutionnel ou juridique, les acteurs de la communauté universitaire restent préoccupés, guettant du coin de l’œil le prochain acte de l’exécutif sur la question de la démocratie universitaire.

Adjéi KPONON

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