Placée sous la tutelle de la Fédération Nationale des Etudiants du Bénin (FNEB), la Police Universitaire est, dans le jargon universitaire, une institution spécialisée chargée d’assurer la sécurité des biens et des personnes à l’Université d’Abomey-Calavi (UAC). Educ’Action est allé sur les traces de cette institution, le vendredi 12 février 2021. Reportage !
Juste un regard dans l’assistance, puis cinq participants à l’assemblée générale désertent les rangs pour suivre l’homme habillé en tenue locale bohoumba, en direction du comptoir du plus grand restaurant universitaire de l’UAC. Nous sommes dans la soirée du vendredi 12 février 2021 au ‘’restau U’’. Quinze minutes nous séparent du deuxième convoyage de la journée des étudiants du campus vers leurs domiciles. C’est la course contre la montre pour les cinq (05) agents de la Police Universitaire (PU) mandatés pour assurer la sécurité au niveau de l’arrêt bus. Blandine Houessou, Etiennette Ahossi, Gildas Adjagborin, Marius Assogba et Isidore Mora, tous étudiants de l’université, arborent leurs gilets et c’est parti pour l’arrêt bus du campus. Sur les lieux, cinq (05) bus du Centre des Œuvres Universitaires et Sociales d’Abomey-Calavi (COUS-AC), positionnés le long de chaque barreau, continuent de charger les derniers étudiants. Répartis en deux (02) équipes à raison de trois (03) agents postés au niveau de l’arrêt bus et deux (02) agents déployés au niveau du rond-point menant à l’entrée principale de l’université, les éléments de la Police Universitaire orientent les motocyclistes et automobilistes qui empruntent les couloirs de sortie des bus.
Sifflet à la bouche, Blandine Houessou vient de donner l’ordre à une motocycliste de changer de trajectoire mais cette dernière refuse d’obtempérer, fonçant toujours en direction de l’arrêt bus. La réplique va être immédiate contre la motocycliste qui n’a pas eu le temps de finir sa course parce que immobilisée en une fraction de secondes par les agents qui se sont rapidement mobilisés autour de l’étudiante.Les bus vont prendre le départ dans une minute de l’arrêt bus et pour les agents, pas question de laisser n’importe quel quidam mettre en péril tout le dispositif sécuritaire mis en place. Pour refus d’obtempérer aux injonctions de l’agent, l’étudiante fautive est contrainte de patienter jusqu’à ce que le dernier bus quitte le périmètre avant de poursuivre son chemin.
A 16 heures 03 minutes, le dernier bus quitte l’arrêt bus, les agents déployés au niveau du rond-point rejoignent en petites foulées leurs collègues de l’arrêt bus. Après le salut militaire adressé à Ramane Adjin, organisateur général et chargé de la coordination des opérations, l’équipe passe au bilan de l’opération. « L’activité vise à permettre la fluidité des bus sur nos pavés, de l’arrêt bus jusqu’à la sortie du portail. Nos éléments formés pour la cause vont d’abord au niveau du garage pour superviser la sortie des bus en vue d’éviter des cas de collision entre motos et bus. Ils reviennent ensuite au niveau de l’arrêt bus pour le même exercice. Les étudiants prennent maintenant départ pour leurs maisons respectives et la Police Universitaire est également présente pour faciliter le convoyage », détaille l’organisateur général pour renseigner sur la mission de la Police Universitaire (PU) dans le service de transport des étudiants.
La gent féminine bien logée au sein de la Police Universitaire
Institution Spécialisée (IS) de la FNEB, la ‘’P.U’’, comme on l’appelle à l’université, boucle déjà deux décennies d’existence et a pour mission d’assurer la sécurité des biens et des personnes au sein de l’université. « La Police Universitaire a été créée à une époque où les plus forts martyrisent souvent les plus faibles. Pour des actes qui ne signifiaient rien, on peut te tabasser. C’est pour aider les plus faibles à se faire respecter en tant qu’étudiants sur le campus que la Police Universitaire a été créée », raconte Judicaël Gbènangon Djokpe, directeur actuel de la Police Universitaire.
Restée longtemps une chasse gardée des hommes, l’institution spécialisée en charge de la sécurité au sein du campus universitaire est adulée des demoiselles. Etudiante en deuxième année de Droit à la Faculté de Droit et de Sciences Politiques (FADESP), Blandine Houessou fait partie du personnel féminin de la P.U qui a gravi les échelons et occupe aujourd’hui la responsabilité de Cheffe d’Equipe (CE). « C’est d’abord une passion pour moi de pouvoir servir mes camarades et c’est pour cette raison que j’ai choisi la Police Universitaire. Nous privilégions d’abord les camarades avant de penser à nous », confie-t-elle avant d’ajouter qu’elle ne compte pas s’arrêter en si bon chemin parce que sa vision est d’être un jour à la tête de l’institution. Interrogée au sujet de sa collaboration avec ses pairs dans l’institution, Blandine Houessou répond : « Il n’y a pas de distinction entre homme et femme au sein de l’institution, nous sommes tous égaux. Une fois que tu as décidé de faire partir du corps, c’est que tu as décidé d’assumer les mêmes tâches que les hommes. Nous recevons la même formation donc, il n’y a pas affaire de ‘’je suis une femme ‘’».
La Police Universitaire, un sacerdoce !
Les agents de la Police Universitaire ne sont pas rémunérés, confie Gbènangon Djokpè, mais ce n’est pas une raison d’accepter n’importe qui au sein de l’institution. « C’est d’abord une question de volonté et aussi il faut être forcément un étudiant ou un nouveau bachelier. On soumet le postulant à une épreuve au cours de laquelle nous analysons ce qu’il est vraiment. Nous avons des entretiens en face-à-face et analysons les réponses. On étudie la psychologie de la personne, est-ce qu’elle a le sang-froid nécessaire pour supporter les mépris des camarades. C’est après cela qu’on passe à la formation physique », informe le directeur de l’institution spécialisée sur le processus de recrutement au sein de la Police Universitaire. Là aussi, les difficultés ne manquent pas.
Des obstacles à l’accomplissement de la mission de la Police Universitaire
Comme c’est souvent le cas pour plusieurs organisations, la Police Universitaire est confrontée à plusieurs difficultés. L’organisateur général de l’institution spécialisée, Ramane Adjin, énumère : « Du point de vue relationnel, si nous prenons par exemple le cas de l’arrêt bus, vous allez remarquer que parfois, les éléments en service sont vus comme des ‘’pagailleurs’’. Physiquement aussi, il y a des camarades qui pensent que ces éléments qui sont positionnés à ce niveau sont là de façon fortuite. Donc, ils les menacent parfois ». Quant au président de l’institution en charge de la sécurité au sein de la communauté universitaire, la question du financement est une difficulté majeure. « Il n’y a pas de financement, donc c’est difficilement que nous tenons. Tout ce que j’ai réalisé depuis mon arrivée, c’est à la base de fonds propres. Je fais de petites choses pour trouver de l’argent que j’injecte dans la Police Universitaire. Ce n’est pas une chose facile », martèle-t-il avant d’ajouter qu’en dépit des difficultés, la Police Universitaire va continuer de jouer pleinement sa mission au sein de la communauté universitaire.
Edouard KATCHIKPE