Il m’a été donné d’assister à une de ces messes d’éducation de très bonne facture. En vérité, ce fut une organisation de très rare qualité en termes de participants, de mise à disposition de documents et de présence de décideurs ; notamment, les Ministres ayant été omniprésents et actifs. En même temps, il a manqué deux structures à leur plus haut niveau : le Ministère en charge du plan et celui des finances ; le premier pour aider à valider la cohérence des objectifs et la promotion du capital humain attendu et le second pour à la fois soutenir le calcul des besoins et identifier les poches de financement possibles et réalisables. Si ces structures ne comprennent pas leur nécessité et leur qualité en amont des processus éducatifs, le chemin est encore long.
Venons-en maintenant à ce qui nous préoccupe : est-ce que les fruits ont tenu la promesse des fleurs ? Ces invités très variés et qui ont participé à la mise en place de l’éducation moderne ont été réunis pour parler de la qualité de l’éducation dans les enseignements primaire et secondaire. Le document de base à étudier était intéressant et intelligent mais, comme l’a dit l’autre : « à l’ouest, rien de nouveau ». On ne pouvait pas faire plus pour présenter la situation ; en même temps, tout ce qui était écrit, était déjà connu et consigné dans les documents de planification comme le PDDSE, le PSE et autres analyses sectorielles diverses.
Il était quand même important d’insister sur cet aspect de l’éducation ! La force de ce processus, c’est de partir nous dit-on de l’autorité première du pays. C’est déjà un gage de réussite et il nous revenait de savoir si une certaine sincérité ou plutôt une sincérité certaine pouvait prévaloir. Plusieurs personnes et non des moindres du système ont murmuré : Ce sera comme d’habitude : on va se parler mais faire beaucoup d’économie de vérités. Notre système va globalement mal ; c’est évident. Nos décideurs sont-ils au courant ?
La première vérité, c’est que l’éducation béninoise a notablement évolué depuis les années 2000, après les EGE en 1990 et avec notre entrée dans les processus internationaux comme l’EPT et ensuite les OMD, les ODD etc. En même temps, ce sont ces processus qui nous ont fortement aidés, qui ont causé notre perte parce qu’à partir d’un certain moment nous avions commencé à ne plus avoir d’autonomie : de réflexion, de financement et d’action. Au lieu de seulement se faire accompagner intelligemment, en accord avec notre spécificité, nous sommes rentrés dans la mendicité financière et la quasi opacité mentale. On nous donne et on ordonne : nous sommes entrés dans une série d’Aide Publique au Développement, variée, complexe, étouffante et enfin paralysante.
Ceci a causé le premier problème qui a plombé notre système éducatif jusqu’à ce jour : la désorganisation du tissu enseignant ! Ainsi, à un certain moment, on nous a dit que nous n’avions pas de moyens pour recruter des enseignants. Nous avions accepté ce diktat inique qui a été le début de la déchéance de notre éducation avec des corps d’enseignants disparates, démonétisés et démotivés. Nous en sommes arrivés aux vacataires qui ont commencé à s’installer malgré ce qu’on leur reprochait. A un certain moment, on avait même le moyen d’intégrer la majorité dans l’éducation (confer le RESEN 2012). Non, on a cassé pour les AME. Quand, vous parlez, on vous répond : motus, c’est venu de haut. En réalité, cela ne pourrait être que l’avis des cadres ou de PTF qui ne disent que leur vérité aux autorités.
Lorsqu’on revient sur l’objectif de l’atelier qui recherche comme point principal la qualité de nos enseignants à travers leur formation, on se rend compte que la cause racine fondée par l’histoire traumatisante de nos enseignants, n’arrive pas à être identifiée à savoir que cette qualité est dans l’équité. Ceci signifie une nécessaire (re) harmonisation de la profession et de la fonction enseignante à terme. Même type d’enseignants et donc même enseignement. APE, ACE et AME ont le même combat. Comment voulez-vous demander au singe, à l’éléphant et à l’escargot de monter avec la même agilité sur l’arbre de la connaissance ? Il faudrait les mettre au même niveau dans une vision nouvelle : attirer, recruter, élaguer et former avec la même motivation. C’est la vérité. Nous avions fait cette proposition dans un document qui n’a jamais été publié et qui est souvent utilisé par les techniciens : La PNE. Que faire ? Oser la volonté politique en mobilisant sur ce dossier. Nous retenons une chose essentielle : la porte la plus urgente, la plus impérieuse et la plus simple de la qualité est l’unification et la motivation uniforme des types d’enseignants. En attendant, on fait quoi ? On limite la casse en identifiant les meilleurs mécanismes de formation initiale et continue ! Ce sera du quasi paracétamol : ça calme mais ça ne guérit pas ! A suivre !
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe