Laboratoires scolaires au Bénin : Manque d’intrants pour des expérimentations

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L’approvisionnement des laboratoires en intrants pour assurer les travaux de manipulation dans les collèges relève d’un parcours de combattant pour les administrations scolaires. C’est le constat qui se dégage d’une descente effectuée dans des collèges de Cotonou jusqu’à Natitingou.

L’enseignant Jiress Adokpossou est un professeur certifié des Sciences de la Vie et de la Terre (SVT). Pour son enseignement, l’existence d’un laboratoire bien équipé au sein de son collège lui aurait permis de rendre plus concret l’apprentissage de sa matière au niveau des apprenants. « Malheureusement, nous avons des laboratoires qui ne sont pas du tout équipés », a-t-il fait savoir dans un état des lieux fait sur l’existence des laboratoires dans les établissements secondaires. A l’en croire, les enseignements pratiques faits dans les laboratoires permettent aux apprenants de comprendre au mieux les notions que véhicule l’enseignant. Ils permettent aux apprenants de toucher du doigt, les réalités qu’enseigne l’enseignant à travers sa matière. Ce qui rend cette dernière concrète. Mais il faut noter, confie l’enseignant, que les apprenants n’ont aucune occasion de se rendre dans les laboratoires en semaine. A la question de savoir combien de fois les apprenants vont-ils dans les laboratoires en semaine, sa réponse est directe : « 00 fois ». La raison de ce constat sur les laboratoires est toute simple.

La démotivation pour cause d’approvisionnement des laboratoires

L’approvisionnement des laboratoires, pour ce que sait l’enseignant Jiress Adokpossou, se fait suivant le budget de chaque établissement. Cependant, malgré l’importance de ces infrastructures dans l’acquisition des savoirs, elles ne sont pas apprêtées pour jouer convenablement le rôle qui leur incombe. Pour cause, les approvisionnements ne sont pas faits, les laboratoires ne sont pas équipés. Les quelques rares qui existent sont vétustes. Conséquences, « l’absence des laboratoires entraîne la démotivation dans le rang des apprenants. Cela favorise l’échec de ces derniers », a révélé l’enseignant certifié des Sciences de la vie et de la Terre, Jiress Adokpossou. Cap sur la cité des Nantos pour constater l’état des lieux des laboratoires scolaires. Les premiers devoirs du second semestre battent le plein, le jeudi 14 mars 2024 au Collège d’Enseignement Général (CEG) Natitingou 1. Vêtu d’un basin multicolore, Patient Gnitona, le directeur du collège renseigne que l’établissement compte deux laboratoires : un laboratoire des SVT et un autre des SPCT. Avoir un laboratoire dans un établissement, estime-t-il, n’est pas un luxe mais une nécessité, car cela permet aux enfants de joindre la théorie à la pratique. Malheureusement, fait-il constater, ce n’est pas chose facile à Natitingou comme certainement dans d’autres établissements publics. Les deux laboratoires du CEG 1 Natitingou, explique-t-il, comptent des équipements défectueux. « Par exemple, dans le laboratoire des SPCT, les robinets ne sont pas fonctionnels alors qu’il faut de l’eau pour faire les expériences », informe le directeur. Le constat en dit long. Situés à l’arrière de la première rangée de bâtiments du collège, les deux laboratoires se font face. Premier à nous accueillir, c’est le laboratoire des SPCT. Une fois la porte métallique franchie, c’est l’état encore neuf des robinets qui attirent l’attention. Malheureusement, aucune goutte d’eau ne sort quand on les ouvre. Les tables ici ne sont pas en bois mais en béton et recouverts de carreaux blancs. A gauche comme à droite dans la salle, cartons, boîtes, ustensiles et autres objets sont posés sur une longue table. La salle peut accueillir 36 apprenants. Dans le même laboratoire, une autre salle sert à entreposer les équipements. La poussière des lieux exprime bien le non-usage des équipements entassés les uns sur les autres et rangés dans des armoires défectueuses. Du laboratoire des SPCT, la visite se poursuit dans celui des SVT situé juste en face. Ici, par contre, la salle est vide. Seul le tableau vert sur lequel est inscrite une formule, montre qu’il est parfois utilisé, semble-t-il, pour des cours théoriques. Quelques récipients utilisés pour des mélanges chimiques sont posés à peine sur la table dans la salle arrière.

Des équipements du laboratoire de PCT du CEG 1 Natitingou

Les problèmes des laboratoires à Natitingou

En plus de l’état physique et de la qualité des équipements, l’autre souci du directeur du CEG 1 Natitingou, ce sont les intrants pour faire les travaux et manipulations dans les laboratoires. « Parfois, l’établissement n’a pas les moyens pour acheter les réactifs afin de les mettre à disposition des apprenants et des enseignants », fait-il savoir. Même s’il est en charge de l’établissement depuis le 23 octobre 2023, Patient Gnitona reconnaît la difficulté de faire fonctionner les deux laboratoires, faute de laborantin. Il faut une personne qualifiée pour assurer cette tâche dans l’établissement. Ce que le directeur n’a pas perdu de vue, car rassure-t-il, les dispositions sont en train d’être prises pour en recruter un. Pour évaluer tous ces besoins afin de corriger le tir, les animateurs d’établissement sont mis à contribution. « Vers la fin de l’année scolaire, nous demandons aux animateurs d’établissement en SPCT et en SVT d’exprimer leurs besoins. Ces besoins sont transmis au comptable de l’établissement. Lors du vote du budget de l’établissement, ils défendent ce qu’ils ont demandé. Quand cela est validé, on achète le matériel qu’on met à leur disposition », éclaire le directeur. Tout ceci est une question de disponibilités financières.

L’épineuse question des ressources

Pour répondre aux besoins en équipements et en intrants pour les travaux en laboratoires, le CEG 1 Natitingou a aussi besoin de ressources financières pour que les apprenants aient une bonne formation. Comme tous les établissements publics, les contributions scolaires des apprenants sont la principale source de revenus. « Lorsqu’on arrive à faire un bon recouvrement des frais de scolarité, nous pouvons supporter toutes les charges du collège. Sans oublier que l’Etat paie aussi la subvention pour les filles du premier cycle », renseigne Patient Gnitona, assis dans le fauteuil de son bureau. Le prestige de l’établissement du point de vue des compétitions révélé par les nombreux trophées qui trônent sur les deux armoires derrière lui, ne semble pas se répercuter sur le plan financier. Comme de nombreux établissements du Nord Bénin, les frais de scolarité sont différents de ceux des établissements du Sud Bénin, ce qui a aussi ses effets sur la trésorerie des collèges. « La contribution ici n’est pas la même qu’à Cotonou. Cela nous pénalise parce que, quand vous allez au marché pour acheter les fournitures diverses, vous avez moins de ressources. Nous achetons toutes les fournitures au même prix, mais les établissements du sud ont plus de ressources que nous pour le faire », fait savoir le directeur. Cette variation des contributions scolaires, révèle-t-il, est due aux conditions de vie, car on suppose que les parents au nord n’ont pas assez de moyens pour scolariser leurs enfants contrairement à ceux du sud.

Réalisation : Estelle DJIGRI, Adjei KPONON & Edouard KATCHIKPE

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