J’assume ce que je dis : le don n’est pas bon. Certains rectifierons qu’il n’est pas toujours bon tandis que je soutiendrais que, la plupart du temps, il est aussi nocif que le score des guides éclairés de nos royaumes : à 99, 99%, il ne sert pas vraiment la personne qui l’obtient. Le danger, c’est que très souvent, il n’est pas désintéressé et presque toujours, celui qui donne a une idée derrière la tête !
Reprenons cette idée déjà développée dans une ancienne chronique : la nécessaire distinction entre la charité et la justice. Si la charité, il est vrai, participe de l’amour et de la solidarité apparente, la justice est avant tout l’expression d’une rationalité en acte. Le premier colporte des sentiments qui ne connaissent ni l’égalité, ni l’équité tandis que le second, refuse le don et promeut l’entreprise.
La rentrée des classes nous fait assister à une situation curieuse sinon quasi délétère dans le sens où de prétendues personnes charitables envahissent nos écoles et communes pour octroyer des dons de matériels scolaires aux enfants avec force de communication sur les réseaux sociaux. Ceci, à première vue, paraît intéressant car certains donateurs cherchent, de manière véritablement désintéressée, à soulager la misère des populations. Mais, à bien y réfléchir, on peut en douter fortement en termes de problème, de cause et de conséquence.
Tout d’abord, dans son élan prétendu sympathique, le don est fortement inégalitaire dans la mesure où il s’adresse à une population assez nombreuse dont il ne couvre même pas la masse critique à savoir le grand nombre et les démunis. Les enseignants, administrateurs et responsables locaux divers se servent les premiers avant de laisser le reste à quelques rares nécessiteux. Donc, dans la contrée, on a touché le centième de la population, laissant le reste dans l’expectative et la douleur !
Ensuite, la cause de ces dons qu’on croit social réside, pour une large part, dans des calculs politiciens ou de leadership. On voudrait impacter la population à travers une distribution généreuse qui, in fine, privilégie la quantité du nombre de servis au détriment de la qualité du matériel donné. Qu’importe, tout le monde a constaté que le cœur a parlé sinon le bétail électoral a été servi. Dans tous les cas, il a été créé des disparités préjudiciables dans les différents milieux car il y a eu peu d’élus.
Enfin, ces dons divers créent, comme conséquence, une situation dangereuse où les populations commencent à s’habituer à ce principe de l’assistanat. Il est, malheureusement vrai que nos Etats vivent très largement de cet assistanat malgré l’effort de nos gouvernements. Partout et très souvent, nous sommes assistés dans la planification de nos besoins, dans l’élaboration des programmes que nous administrons à nos enfants et pire, nous avions pris, sans nous en rendre compte, l’habitude de commencer à prioriser la main tendue au détriment de notre propre effort. On en arrive à une situation compréhensible où on se résout à distribuer de l’argent à une frange vulnérable de la population que sont les filles qui, en ont certes besoin pour aller à l’école. Mais, on pose ensuite tellement de problème entre les parents et tout l’entourage de ces enfants qui se retrouvent indexés, voire stigmatisés pour ce peu, qui est beaucoup dans nos contrées.
En attendant de résoudre ce problème crucial qui traumatise nos populations déjà gravement dépendantes, la première solution est de fédérer tous les dons et de les centraliser en interdisant, voire en punissant ceux qui établissent ce désordre et ces dysfonctions.
Il est utile de créer un partenariat public-privé à travers lequel tous celles et ceux qui souhaitent aider l’école, viennent déposer leurs contributions qui sera distribuées équitablement par une structure avec ce que l’Etat même octroie, grâce aux partenaires ! C’est la solution adéquate pour la traçabilité et l’équité : Donc, la charité dans la justice en attendant mieux.
Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe