Le français dans les arts : Des artistes virent en langue pour porter l’émotion

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La langue française dans le champ de la créativité et de l’expression culturelle. C’est l’une des problématiques abordées à la 6e édition du Forum « Le français, pour quoi faire ? », qui s’est déroulé du 6 au 8 juin 2024 à Cotonou. Pour des artistes, une prestation artistique en français nécessite parfois un virage en langue maternelle.

«Le français dans les arts : enrichissement ou appauvrissement ? ». C’est un questionnement qui a alimenté les discussions à l’avant-dernière table ronde de l’édition béninoise du forum « Notre Futur – Dialogues Afrique-Europe ». Le samedi 8 juin 2024 à la salle rouge du Palais des congrès de Cotonou, des acteurs de la culture venus de divers horizons ont apporté des éléments de réponse à cette problématique de la langue française dans le champ de la créativité et de l’expression culturelle. Les panelistes invités à cet exercice sont Dalila Boitaud-Mazaudier, autrice française et metteuse en scène ; Diadié Dembélé, écrivain malien ; Claude Balogoun, réalisateur et producteur béninois ; la slameuse Harmonie Byll Catarya du Bénin et le comédien béninois Carlos Zinsou. Suivant les explications de la plupart des orateurs, le français est la langue d’expression artistique mais la langue maternelle reste la langue d’inspiration pour une création. Il faut être imprégné d’une culture, estime Claude Balogoun, avant de pouvoir s’exprimer dans cette culture. S’inscrivant dans le même ordre d’idée, Carlos Zinsou souligne que dans un processus de création, il s’interroge d’abord en langue fongbé. « Il y a des choses en français que je n’arrive toujours pas à appréhender. Par contre, le faire dans ma langue maternelle est plus aisé pour moi. Il y a des choses que ma langue maternelle m’autorise à dire et que la langue française ne m’autorise pas facilement à dire », précise-t-il pour montrer que l’artiste est parfois bloqué dans l’expression scénique en français et c’est la langue maternelle qui vient à la rescousse, en sauvetage. C’est en cela que la slameuse béninoise Harmonie Byll Catarya pense qu’il y a un carrefour dans l’expression scénique qui oblige l’artiste à virer nécessairement vers la langue maternelle. Ce carrefour est vite franchi quand l’artiste aspire porter ses charges émotionnelles au sein de son public.

Le virage en langue maternelle des artistes pour porter l’émotion

Les artistes ne peuvent pas tout exprimer en français parce que cette langue a des limites. C’est en cela que le recourt aux langues nationales devient indispensable. Autrice et metteuse en scène, Dalila Boitaud-Mazaudier estime que le transfert d’une langue à une autre peut faire perdre à une expression scénique sa profondeur. Elle en veut pour preuve, la pensée qui stipule : « traduire, c’est trahir. »
« Quelque fois, j’ai du mal à aller en langue française. C’est en cela que notre culture enrichie la langue française. C’est en cela que je dis que la langue française est à moi, elle m’appartient et j’en ferai ce que je veux et ce que je peux quand je voudrais et où je voudrais », martèle le comédien Carlos Zinsou. Selon les panelistes, la culture africaine a énormément apporté à l’enrichissement de langue française. A la question de savoir si les créations ont contribué à l’enrichissement ou l’appauvrissement de la langue française, la slameuse Harmonie répond : « On nous a donné le français et nous l’avons amélioré. Cette amélioration s’est faite avec les subtilités de notre culture. Nous parlons un français emprunt de notre culture, de notre africanité. »
Pour Diadié Dembélé, la culture africaine a beaucoup apporté à la langue française. L’écrivain malien reconnaît avoir souvent faire recourt à sa langue maternelle dans sa démarche d’écriture. Pour ce qui ressort du dosage dans l’usage de la langue maternelle à côté de la langue française, Diadié Dembélé pense que cela dépend du contexte qu’il souhaite raconter.

Le public attentif au débat

 

La place de la langue française passée au questionnement

Initiative de l’Institut français, le forum « Le français, pour quoi faire ? », qui s’est déroulé du 6 au 8 juin 2024 à Cotonou, a réuni des experts, chercheurs, artistes, activistes, entrepreneurs et une jeunesse engagée issue de nombreux pays d’Afrique et d’Europe. A l’occasion de cette rencontre de Cotonou, les participants ont échangé autour des questions liée à la langue française entre propriété et appropriation ; la langue française dans le dialogue social et politique ; la langue française comme langue professionnelle d’activité économique et la langue française dans le champ de la créativité et de l’expression culturelle. La 6e édition de ce forum sur le questionnement de la place de la langue française, s’est non seulement intéressée aux opportunités qu’offre la langue française mais aussi les entraves auxquelles elle peut être associée. Au terme des trois jours du forum « Le français, pour quoi faire ? », des recommandations ont été formulées et des projets proposés pour nourrir le 19e Sommet de la Francophonie, qui se tiendra en France les 4 et 5 octobre 2024. La prochaine édition du forum est prévue pour se dérouler en 2025 à Salvador de Bahia au Brésil.

Edouard KATCHIKPE

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