La préoccupation sonne comme une question majeure vu que la tendance, aujourd’hui, est de faire du Bénin le grenier de l’Afrique, ou à défaut le grenier de l’espace ouest-africain. A cet effet, le discours de l’autosuffisance alimentaire et de la révolution verte est repris en chœur au sommet de l’Etat. La bataille pour la mécanisation de l’agriculture a été engagée dans les sphères du pouvoir avec l’accompagnement technique et matériel du désormais premier partenaire du Bénin, la Chine. On dirait qu’ils, les décideurs, ont enfin trouvé le filon idoine pour crier victoire et, par ricochet, chanter le requiem des tristes époques de faible rendement agricole. Mais c’est sans compter avec les bras valides du monde rural qui ont fini par se sédimenter à Cotonou à la quête d’un emploi hypothétique. Et s’il est encore opportun de schématiser la situation, nous avons face à la volonté du pouvoir central de promouvoir l’agriculture avec des moyens subséquents, la volonté débordante manifestement exprimée de ces bras valides qui travaillaient initialement la terre de s’exporter. D’où la question de la main d’œuvre pour réussir le combat de la modernisation agricole. Mais pendant ce temps, cette main d’œuvre de qualité non exploitée est maintenue au repos dans nos maisons d’arrêt et nourrie aux frais de la République. Selon le rapport élaboré sur la situation générale des prisons et des détenus au Bénin, l’effectif carcéral de la prison civile de Cotonou à la date du 4 juin 2010 était de 2.094 pour une capacité réelle de 400 places. Plus récent, le jeudi 18 Août, lors de la visite du Chef de l’Etat dans cette même maison, l’effectif s’est accru considérablement. Aux dires du régisseur, la maison d’arrêt de Cotonou compte de nos jours 2.253 détenus toutes catégories confondues dont 2.121 détenus en prévention et 132 condamnés. Ce qui fait plus de sept fois la capacité d’accueil initialement prévue. Et ce tableau de surpopulation carcérale est semblable dans presque toutes les maisons d’arrêt. Alors qu’on pouvait, dans le cadre d’une politique de gestion et de management bien élaborée, songer à mettre au travail les détenus pour, premièrement conjurer en eux le sort du mal et de l’oisiveté et deuxièmement susciter chez ces divorcés sociaux le goût du travail et du travail bien fait. Et c’est notre agriculture aujourd’hui à court de main d’œuvre qui s’en sortirait grandie et promue dans l’intérêt commun de tous. Avis donc aux décideurs.
Serge-David ZOUEME