La deuxième chronique consacrée à l’examen de l’annonce de notre autorité première sur l’éducation nous a permis de défendre la thèse selon laquelle il est important de s’attacher à une vision systémique de l’éducation en identifiant les problèmes structurels qui se posent.
Nous avions ainsi soutenu que toute gestion pertinente des ressources enseignantes (attirer, recruter, maitriser, maintenir et enfin déployer) devrait être liée à une révision harmonieuse et pertinente des curricula qui dégage le superflu et ajoute la nouvelle dimension des activités liées à l’ETFP. Ceci de commun accord avec les pédagogues de la Maternelle au Supérieur à partir d’une même vision. Nous aurons donc besoin de moins d’enseignants avec le nombre d’élèves actuels et nous attacherions à la promotion d’un élève qui apprend à réfléchir pour comprendre et façonner son milieu. Prenons donc un exemple.
L’univers d’un écolier, d’un élève ou d’un étudiant est régi par deux entités essentielles dans lesquelles il se meut et se réalise à savoir l’espace et le temps. Vous verrez donc que chaque discipline, chaque cours et chaque activité participent de cela. C’est pourquoi, l’éducation devrait consister à faire prendre conscience à l’enfant de l’importance de ces deux entités, de comment les maitriser et les utiliser à bon escient. Toutes les matières enseignées ne sont que l’expression du pourquoi et surtout du comment les appréhender. Nous ne parlons pas ici de théorie philosophique de l’espace et du temps.
Je souhaite prendre l’exemple d’une des matières, l’histoire-géographie (H-G) à laquelle on ne donne pas autant d’importance que les mathématiques alors qu’elle devrait être le sous bassement des connaissances administrées à l’enfant. Pour résumer ici, il s’agit de montrer à l’enfant qu’il vient d’un milieu (l’espace), sinon d’un pays et a une culture (le temps). Le rôle de l’enseignant, c’est de l’ouvrir à son monde à travers les âges et les conditions de subsistance et de profiler l’avenir de ce monde. L’apprenti doit, in fine, savoir que c’est la compréhension de son monde, son assimilation et la maitrise des techniques de sa transformation harmonieuse (non pas sa destruction irrespectueuse, anarchique et systématique à des fins personnelles) qui permettront son développement.
Le rôle d’une éducation n’est pas d’étager les soi-disant plus forts dont la réussite s’exprime seulement dans la monétisation, le développement d’idéologies et de morales liberticides qu’on appelle mondialisation, industrialisation, médiatisation. L’éducation se doit d’ouvrir le champ des possibilités de développement de son milieu et de réalisation de soi.
C’est pourquoi les pédagogues d’un pays et d’une nation ne doivent pas promouvoir une idéologie de soumission et de permission qui consiste dans un curriculum, à insister dès le départ sur les nations soi-disant dominées et celles dominantes. En effet, les deux premières Situations d’Apprentissage du programme d’H-G sont respectivement intitulées « organisation économique d’un pays à économie dominée » et « organisation économique d’un pays à économie dominante » entrecoupées de « l’ONU et la gestion du monde » (j’aurais même préféré le « Conseil de l’entente et la problématique de l’intégration régionale »).Comment de tels titres et de telles approches d’enseignement peuvent-ils donner des leçons et développer le potentiel de nos enfants à qui on démontre qu’ils sont nés dans des sociétés peu efficaces à la base et qui doivent ipso facto se tourner vers d’autres pour réussir ! Dès leur tendre âge, on dit à nos élèves et étudiants qu’ils sont du mauvais côté et eux, fils d’éleveurs ou de paysans dans un village enclavé de la commune de Karimama ou de Lalo, rien ne leur parle de leurs milieux, de ses potentialités et de comment le développer !
L’éducation doit d’abord et avant tout plonger l’enfant dans l’appréhension de sa réalité et poursuivre en élargissant ses horizons par les meilleures pratiques. Il s’agira de lui donner l’opportunité d’apprécier les habitudes et pratiques ; les savoirs et savoir-faire voire les savoir-vivre endogènes et comment les lier et les améliorer à travers la modernité, c’est-à dire les autres mondes qu’on lui propose.
Est-ce que la révolution éducative pourrait se mettre en marche ? Il y a déjà un document élaboré depuis quelques temps intitulé ‘’Politique Nationale Enseignante’’, qui propose quelques aspects de cette rupture épistémologique nécessaire dans notre éducation. Il (le document de politique) est encore dans les arcanes d’une de nos institutions partenaires. Gageons que sa diffusion prochaine soit l’expression d’un départ, que nos cadres planificateurs et pédagogues notamment, qui ont la compétence nécessaire, prendront.
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe