L’Ecole de notre temps bénéficie de quelques refontes, des secours urgents pour lui permettre de jouir de la plénitude de ses performances ; tellement les difficultés sont écrasantes. Dès sa prise en mains du pays en 2016, le chantre de la ‘‘Rupture’’ a déployé une bactérie de décisions et d’actions qui concourent, peu à peu, à la transformation du secteur éducatif béninois qui recherche encore son équilibre. On se rappelle encore les pires moments du système éducatif avec la marche forcée vers l’évaluation diagnostique des enseignants. Que de nerfs éprouvés !
Les conséquences de cette option éducative tombent aujourd’hui dans le cercle ouvert des acquis : les réfractaires des sous secteurs primaire et secondaire sont libérés et jetés dans la poubelle des indociles de la République qui, elle, continue sa longue marche d’assainissement des mœurs pour rebâtir, à moyen et long terme, une nation vertueuse, une cité d’hommes et de femmes angéliques, artisans de développement et non acteurs de compromission funeste et anti développeurs.
L’Ecole sans enseignants de forme multigrade, a embuché une nouvelle appellation : les aspirants pour certainement arrêter l’asphyxie. Dans la forme, cette approche conjoncturelle des autorités publiques béninoises tend à faire souffler temporairement le système éducatif ; seulement que dans le fond, l’insatisfaction à plusieurs égards se conjugue au présent et déjoue timidement les pronostics du départ. La conscience professionnelle, le travail bien fait et surtout la qualité des enseignements dispensés par ces nouvelles recrues, restent une équation à multiples inconnues sur fond de déception.
En 2019, l’année dernière donc qui coïncide avec la phase expérimentale de cette trouvaille éducative, plusieurs jeunes gens de profils variés et de compétences dissemblables ont découvert l’univers tumultueux de l’école, le côté cour et le côté jardin un peu comme sur une scène de théâtre. Ils ont sûrement aspiré la folle poussière des craies et des salles de classes non cimentées ; ils ont certainement et vainement répondu aux questions impertinentes et pernicieuses de quelques étourdis et jubilants apprenants aux cheveux mal peignés ; ils ont aussi et encore fait l’éprouvante expérience de ces cordons bleu du secteur, ces bonnes dames de nos écoles tragiquement mal formées qui peinent à offrir des plats de qualité ; ils ont encore et encore subi, déconcertant, les envolées colériques de quelques parents d’élèves déboussolés, ivrognes ou carrément irresponsables ; ils ont… ; ils ont… ; ils ont…
Dans la vague battante et drôlement berçante de ces supplices, certains de ces jeunes gens, poussés illicitement à la craie par le courant de la vie, retrouvent, hélas, le salut dans l’entrejambe de leurs apprenantes matures ou non. D’autres moins outrecuidants et vicieux ont renoncé à l’appel, abandonnant classes, écoliers et élèves. Le tableau semble moins reluisant, et c’est bien dans ce contexte lugubre, par endroits, qu’on invite de nouveaux aspirants au métier d’enseignant au primaire et au secondaire général, à grossir la base de données gouvernementales.
En effet, le communiqué conjoint radio-télé diffusé du mercredi 04 mars 2020 indique, en substance, que « Pour résorber le déficit en enseignants qualifiés et conformément à son engagement de faire de l’Education un levier stratégique pour le développement économique et social durable du pays, le Gouvernement a entrepris de renforcer la base de compétences au métier d’enseignant au primaire et au secondaire général, constituée en 2019. Par conséquent, nous invitons tous les détenteurs de diplômes académiques et/ou professionnels, aspirant au métier d’enseignant au profit des établissements scolaires publics du primaire et du secondaire général à s’inscrire, du jeudi 05 au vendredi 27 mars 2020, au niveau de la Direction Départementale des Enseignements Maternel et Primaire ou de la Direction Départementale des Enseignements Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle de leur choix… »
Si l’intention répond au désir de solutionner l’un des problèmes de l’école, à savoir le déficit d’enseignants dans les salles de classes au primaire et au secondaire général dans le public, l’approche méthodologique semble biaisée. Toute démarche innovante et constructive recommande, dans le cas d’espèce, une évaluation partielle ou à mi-parcours, de la phase 2019 du déploiement des aspirants sur le terrain, identifier les forces et faiblesses de cette initiative et envisager aussitôt des mesures correctives avant toute relance. Est-ce le cas ! Tout laisse croire qu’on prendra les mêmes pour les mêmes résultats à la longue. Vive l’Ecole !
Serge David ZOUEME, Spécialiste de l’éducation, Administrateur du patrimoine culturel