Je suis un homme, mais je ne pense pas avoir reçu le bon sexe. Ne vous méprenez pas, je ne suis pas de ceux qui se plient à la mode du moment en cherchant à changer de genre. D’ailleurs cela ne servira pas à grand-chose car, j’ai plus de soixante ans et je me sens très mal dans ma peau à cause de ce que ma femme a fait de ma vie.
Je suis chez moi, dans ma maison que j’ai construite avec le temps. Maintenant, il y reste ma femme et moi qui avions passé des dizaines d’années de vie commune, tandis que les enfants sont dispersés dans plusieurs continents. Et, c’est après ma retraite que j’ai commencé à comprendre ma douleur car, je vais lentement et sûrement vers l’inhumain et le néant ! A mesure que je déprime et m’isole malgré moi, ma femme reverdit, toujours au téléphone avec ses enfants et prête à rejoindre l’un d’entre eux à des milliers de kilomètres.
Ces enfants me demandaient à peine, n’avait surtout pas besoin de mes conseils car, comme ils le disent souvent, c’est maman qui les a faits, protégés et construits tandis que je n’étais jamais là. C’est cette femme formidable qui, seule, avait dépensé, payé leur écolage et envoyé à l’extérieur. Bon, c’est vrai, papa a un peu participé mais c’était sous l’impulsion de la seule et unique déesse courage de la maison.
Est-ce que vous avez commencé à vous rendre compte de mon enfer ? Moi jeune et fringant cadre, j’ai épousé une femme que j’ai pris le temps d’aimer, de comprendre et d’accepter. J’ai gravi les échelons de la vie professionnelle et nous avions eu plusieurs enfants qui ont été notre priorité. J’ai eu le bon sens de laisser ma femme commercer et avoir des biens : voiture, immobiliers. Je ne sais pas si c’est cela que nos femmes intelligentes qui diabolisent les hommes à longueur de journée, appellent liberté et autonomie.
En fait, obnubilé par l’avenir des enfants, j’estimais que chacun de nous devrait avoir la capacité financière de participer aux dépenses. Beaucoup de proches reprouvaient cette vision qui, selon eux, fait des femmes des personnes irrespectueuses et manipulatrices.
Malgré tout ce que je vis aujourd’hui, je n’ai pas regretté cela car, honnêtement, madame fait bouillir la marmite plus que moi actuellement. Cela me permet de disposer un peu plus de ma maigre pension qui ne permet plus d’aller conter fleurette à une quelconque dulcinée.
C’est vrai : je reconnais que pendant mes vertes années, j’avais fait quelques quatre cent coups, croyant sincèrement que les femmes que je rencontrais m’aimaient d’amour et d’eau fraîche ! Une, particulièrement tenace, se jura à m’épouser. Ce fut une bataille des plus rudes où toute la famille y laissa des plumes. Cela se tassa, mais laissa des séquelles car, les enfants me cataloguèrent comme un père jamais là ; toujours en mission ou en vadrouille qui revenait crier sur leur sainte mère, pilier de la messe du dimanche.
Effectivement toujours pressé par le travail, les missions nombreuses, je déléguais beaucoup à ma femme entre deux disputes. J’étais le chef de famille, mais elle était la maîtresse de maison ; ministre du budget et du personnel. A cet effet, je lui faisais un appui budgétaire pour tout : écolage, petit déjeuner des enfants, popote etc. Chaque fois qu’un enfant me posait un problème, je l’envoyais chez sa maman, n’ayant pas souvent le temps pour ces petits riens qui, en réalité, je le comprendrais plus tard, sont tout.
Ainsi, maman gère tout, donne tout et je faisais juste attention à l’éducation à savoir les enseignants à prendre, le suivi du cursus. Et, un à un, j’établissais avec eux un projet de voyage et pendant que je m’occupais du billet d’avion, maman assurait le reste qui s’avère être le plus important pour eux. C’est pourquoi, partis, ils ont effacé ce père lointain que leur mère avait contribué à diaboliser et anéantir.
Je compris que, patiemment, insidieusement la vertueuse dame m’avait éloigné de tout à savoir : enfants, famille, argent, voire seconde épouse pour m’entraîner lentement et sûrement vers le couloir de la mort. Je compris, bien trop tard, que la violence, la vraie violence n’est pas seulement faite aux femmes, mais encore souvent par les femmes !
Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe