Maxime Agoua, chargé de programmes du ReSPESD : « L’école n’a pas pour vocation d’exclure »

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Des promoteurs d’établissements privés d’enseignement maternel et primaire organisent, par anticipation, chaque année, la fête de Noël pour ragaillardir les enfants avant de les envoyer en congés de fin d’année. A l’occasion de cette fête, certains enfants sont laissés sur le carreau, faute de moyens de leurs parents. Maxime Agoua, chargé de programmes du Réseau des Structures de Protection des Enfants en Situation Difficile (ReSPESD) aborde, via cet entretien, les frustrations du rejet de quelques enfants lors de cette fête. Il partage de même des idées avec ces promoteurs pour de prochaines fêtes sans enfants exclus. Lisez plutôt !

Educ’Action : Que pensez-vous de l’organisation de la fête de Noël à l’école avant les congés de fin d’année ?

Maxime Agoua : Effectivement, nous assistons depuis un certain temps à un phénomène qui n’est pas aussi récent. Il s’agit de l’organisation des journées de réjouissance, en l’occurrence la fête de Noël au profit des enfants des établissements privés d’enseignement maternel et primaire. A cette occasion, des cadeaux sont donnés à qui mieux-mieux aux enfants aux fins de leur procurer la joie et leur apprendre le vivre-ensemble. Seulement, il se trouve que, pour mener à bien l’organisation de cette fête, ce sont souvent les parents de ces enfants qui sont sollicités pour prêter main forte au comité d’organisation mis en place par les promoteurs de l’établissement. Et ce, à travers des dons ou des enveloppes envoyées pour l’achat des cadeaux à donner à ses enfants. Il est demandé donc à tous les parents d’élèves de participer à la tenue, de quelques manières, de cette journée de réjouissance qu’est la fête de Noël.

Cependant, certains enfants sont interdits d’accès au lieu de fête. Quelle lecture faites-vous de cette situation ?

Malheureusement, il se trouve que tous les parents n’ont pas les moyens pour véritablement donner l’occasion à leurs enfants de prendre part à cette fête. Pour la plupart du temps, je crois que les enfants dont les parents n’ont pas pu matériellement ou financièrement, sont exclus. C’est une forme de brimade qui ne dit pas son nom. La loi N°2015-08 du 08 décembre 2015 portant code de l’enfant en République du Bénin est clair là-dessus en ce sens que tout acte à poser à l’endroit de l’enfant, doit prendre en compte son intérêt supérieur. L’intérêt supérieur de l’enfant, c’est de veiller à ce qu’il ne soit pas brimé, à ce qu’il ne connaisse pas des actes qui compromettent son bien-être intégral.

Quel choc psychologique l’exclusion d’un enfant de la fête peut-il avoir sur sa personne ?

L’école est, par excellence, le lieu de sociabilisation. C’est à l’école que le citoyen de demain est formé. Et donc, exclure des enfants peut avoir des conséquences morales voire psychologiques fâcheuses sur eux. Un enfant exclu lors de cette fête peut avoir un dégoût de l’école parce qu’il se sent rejeté, brimé, ignoré. Il se sent tout simplement abandonné et cet enfant peut se recroqueviller sur lui-même et se dire que l’école n’est pas le lieu où son être est valorisé. C’est fondamentalement une préoccupation pour nous, acteurs de protection de l’enfant. Nous pensons que les établissements privés qui s’inscrivent dans cette logique, doivent tenir compte de l’intérêt supérieur des enfants dans le cadre de la célébration de cette fête.

Quelle stratégie les promoteurs des écoles privées peuvent-ils mettre en place pour ne pas laisser des enfants sur le carreau lors de cette fête ?

D’abord, il faut veiller à ce que les parents qui n’ont pas pu contribuer matériellement ou financièrement à la tenue de cette journée de réjouissance, puissent voir leurs enfants prendre part à la fête de Noël. Nous pouvons, dans une démarche d’inéquation, trouver des canaux de participation à ces enfants dont les parents n’ont pas pu satisfaire à l’exigence de l’établissement. Les parents qui ont donné un peu plus, nous pouvons, à la demande de l’administration, permettre à ce qu’ils auraient promis non seulement satisfaire à la jouissance de leurs enfants, mais également à celle des autres enfants dont les parents n’ont pas les moyens. Nous pensons que cette démarche devrait pouvoir régler la question de frustration, de rejet et d’abandon que les enfants connaissent dans le cadre de cette journée de réjouissance. L’idée n’est pas de mettre un terme à cette fête, mais de trouver la formule pour que tous les enfants participent à cette journée dans une démarche d’inclusion et participative. Car, l’intérêt supérieur de l’enfant devrait être au-delà de tout. Le rejet et l’abandon des enfants à l’occasion de ces journées de réjouissance, peuvent être préjudiciables au bien-être intégral de l’enfant. Ce dernier va se sentir rejeté or l’école n’a pas pour vocation de rejeter ou d’exclure. C’est à l’école que le citoyen de demain est forgé pour son bien-être et pour l’édification de la société.

Propos recueillis par Enock GUIDJIME

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