Dans le développement psychosocial et affectif de l’enfant, l’écoute active des parents reste un levier capital d’épanouissement, d’une forte estime de soi. Mieux, elle participe à poser les bases d’une relation de confiance et évite à l’enfant, les comportements déviants. Michel Djagbassou, psychologue clinicien, nous en parle.
Educ’Action : Qu’est-ce que l’écoute active ?
Michel Djagbassou : L’écoute simple, c’est écouter quelqu’un sans prendre vraiment en compte le fond de ce qu’il dit. Comme exemple tout simple, lorsqu’un enfant va vers son père et dit « Papa, je ne veux plus jouer avec tel ami », l’écoute simple va passer inaperçu, le papa ne va pas y prêter attention. L’écoute active va, par contre, pousser le père en question, à chercher à comprendre le pourquoi de cette décision de l’enfant en lui posant les questions essentielles afin de mieux comprendre. Un autre exemple tout simple se réfère au fait qu’en voulant sortir en famille, l’enfant fasse savoir à ses parents qu’il n’apprécie pas le lieu dans lequel la famille voudrait se rendre. L’écoute active va consister à lui demander le pourquoi pour comprendre les besoins de l’enfant. En adoptant cette posture, l’enfant va se rendre disponible pour exprimer ce qu’il ressent, ce qui explique son refus et surtout ce qui est enfoui en lui qui vient mieux expliquer ce refus.
Le psychologue Carl Rogers est le père de la technique de l’écoute active et il la définit comme : « une méthode de communication destinée à fluidifier les échanges ». Plus loin, Françoise Dolto considère l’écoute active comme une plainte, une préoccupation que l’enfant vient vers ses parents déposer. Le parent doit donc, se rendre disponible pour traiter sa plainte afin de pouvoir lui donner en retour une réponse. En résumé, l’écoute active permet à l’enfant de mieux s’exprimer, de mieux dire ce qui fait mal en lui et de se faire comprendre. De plus, cela crée une confiance en lui.
Quelle est la place de l’écoute active dans la relation parent-enfant ?
Elle renforce cette relation. Elle permet à l’enfant de se confier aux parents et donc une implication de la grande confiance en lui. L’écoute active crée aussi des occasions d’échanges qui soudent les parents et les enfants. Aussi crée-t-elle des liens forts entre les parents et leurs progénitures de même qu’elle permet à ces derniers de se partager de petits secrets en complicité.
Quels sont les avantages de l’écoute active sur le développement psychosocial et affectif de l’enfant ?
Lorsque l’enfant se sent écouté, il a la confiance et en psychologie, la confiance crée l’attachement. L’enfant s’attache et confie même des choses impensables ayant par exemple un lien avec le viol, l’agression sexuelle. Il livre facilement en toute confiance, de petits secrets. L’autre avantage est qu’il aura un bon développement cognitif. Il sera bien éveillé avec une forte estime de soi. Son intelligence émotionnelle sera bien améliorée, la communication avec ses parents sera facile.
À quel stade de son développement est-ce que l’enfant a le plus besoin d’être activement écouté ?
C’est le stade imaginaire et émotionnel. C’est un stade qui correspond à la maternelle et qui va de 03 ans à 05 ans. À ce stade, l’enfant commence à nouer des liens d’amitié, développe la curiosité et se pose pleins de questions de même qu’il veut tout dire. Il y a également, le stade de latence. À ce niveau, les choses s’accentuent le plus, puisque le petit bonhomme est entre le stade d’enfant et celui de l’adolescence. Ce stade correspond aussi au stade œdipien selon Sigmund Freud. L’éducation de l’enfant à ce stade est très capitale. Les parents doivent rester beaucoup plus attentifs car, une fois ce stade dépassé et que l’écoute active n’a pas été maintenue au profit de l’enfant, une fois devenu adulte, il sera une préoccupation pour la société. C’est le complément au premier stade et cela va de 06 à 12 ans.
Quels sont les étapes de l’écoute active ?
Il y a quatre (04) étapes. Le premier niveau est l’écoute attentive. Il s’agit ici, d’écouter l’enfant sans interruption. Le deuxième niveau est celui de la clarification qui se réfère au questionnement. Ensuite, le troisième niveau se réfère à l’investigation qui consiste à poser des questions profondes en poussant l’enfant à mieux s’expliquer. Enfin, le dernier et quatrième niveau est celui de la reformulation qui permet de synthétiser et de confirmer la compréhension des propos de l’enfant.
À quoi peut-on reconnaître un parent qui pratique l’écoute active ?
Un tel parent est distingué par son état empathique. C’est un parent qui a de l’empathie pour les enfants, il est compréhensif et cherche à comprendre les propos des enfants. Il garde le calme, le sang-froid, il ne réprimande pas les enfants, il ne les agresse pas. Ces qualités permettent déjà d’identifier qu’un parent pratique l’écoute active.
Quelles sont les circonstances dans lesquelles l’enfant a le plus besoin de l’écoute active des parents ?
Ce sont souvent des situations d’inadéquation sociale où l’enfant est en danger et l’écoute est déjà une forme de thérapie pour lui. Un enfant avec qui l’on n’a pas le temps de jouer, qui n’est pas souvent écouté, ne peut pas s’épanouir. Aussi, lorsque cet enfant subit des réprimandes ou de l’agressivité, il ne fera que reproduire les mêmes comportements. Face à cela, l’on pourra assister chez cet enfant, à de petites déviances comportementales qui peuvent donner naissance à des actes de vol, de mensonge, etc.
Que dire pour conclure ?
J’invite les parents à prendre conscience de la situation. Je les invite à pratiquer l’écoute active au bénéfice des enfants puisque quand c’est le cas, ce dernier fait confiance et peut se confier librement à la société. Il sera donc un bon produit pour la société et cela lui permettrait d’éviter les déviances comportementales comme par exemple, la cybercriminalité, l’agression et bien d’autres.
Propos recueillis par Gloria ADJIVESSODE
