Bonne année 2022 ! Nous sommes une société de conventions. Notre raison ou encore notre conscience a tissé, au fil du temps, des normes qui protègent le genre humain et le font avancer, à la limite au détriment de tous les autres êtres animés (règnes animal et végétal) ou inanimés. Aussi avons-nous des États, des monnaies, plusieurs organisations internationales comme l’ONU ou l’UEMOA : autant de repères pour préserver la liberté et la sécurité de chacun et de tous.
Par ailleurs, ce souci de stabilité et d’autonomie des sociétés et des peuples est sans cesse miné par des élans et des forces irrésistibles qui tendent à créer de nouvelles dynamiques sociales. Ceux-ci viennent ébranler les règles établies, au nom de prétendues sciences et de prétendues évolutions du bien-être de l’espèce humaine. De nouveaux groupes plus puissants que les États se créent ; les valeurs scientifiques, intellectuelles et financières se concentrent dans les mains d’une minorité qui annihile la masse dans le superflu médiatique et le repli sécuritaire ! L’humanité oublie ses repères dans une gigantesque manipulation de masse. Là, ce ne sont plus les États qui dirigent mais des nébuleuses. Elles cherchent à créer l’individu de demain, apathique, prévisible et docile. Jadis, nous revendiquions une nature et une culture, aujourd’hui, nous sommes juste une cassure !
En effet, la nature est pleine de potentialité et chez les animaux, elle est l’instinct de survie ; la culture était la nature affinée à l’aune des acquis de l’éducation qui faisait de chaque être une entité différente, définie et pleins de projets. Mais l’homme actuel est comprimé, réprimé, compressé et donc déshumanisé car le nouveau type d’éducation l’uniformise et le tourne vers l’obéissance et le besoin compulsif du ludique et du sédatif !
Examinons l’exemple le plus simple : l’éducation africaine dont on reconnaissait la qualité des enseignants, ne cesse de régresser depuis des décennies. Le corps enseignant était le fer de lance du système, qui formait des élèves de qualité. Les enseignants ont lentement et fermement été dégradés et dénaturés pour devenir actuellement les rouages les moins importants du système éducatif. A côté de cela, les curricula ont continué à perdurer dans des apprentissages peu efficaces où l’élève compile à longueur de journées longues et harassantes et n’apprend rien qui lui donne une compétence.
En définitive, le plus important entre l’enseignant dévalué et les curricula quasi-inutiles, ce sont les media symbolisés par Canal+ et whatsapp. Ils satisfont petits et grands parce qu’ils ont créé la solution qui nous permet de vivre « heureux » en nous abêtissant dans ce qui nous aide à supporter notre quotidien insipide. La nouvelle mode, c’est de déambuler dans la rue avec ce sacro-saint portable, faisant semblant de le consulter sans regarder où l’on va. Cette société nouvelle où le futile devient l’essentiel deviendra-t-elle notre seul horizon ? Plus rien ne nous intéresse : le travail et donc la réalisation de soi à travers les activités génératrices de revenu n’est plus prioritaire. La priorité va au temps libre, pour échapper au quotidien difficile auquel on ne cherche plus la véritable solution qui consiste à persévérer pour trouver un travail à faire. Dans un climat d’incitation à l’oisiveté, le moi s’abandonne à des dynamiques nouvelles inutiles et nuisibles.
Certes, la plupart des pays sub-sahariens connaissent des économies chaotiques, des États déstabilisés par des menaces sécuritaires ou sanitaires. La communauté dite internationale, par le biais de structures qui ne sont même pas étatiques, décerne parfois des satisfécits en termes économiques à nos États. Cependant, des populations désespérées continuent de voir des gamelles vides et des ventres creux. Il reste peu d’opportunités. Elles ne peuvent venir que d’une éducation revisitée qui se fonde sur l’environnement de l’apprenant et lui inculque la connaissance et la compréhension de son milieu. Les gouvernants en sont, pour la plupart, soucieux mais continuent pour une large part à croire à la qualité des aides étrangères au lieu de se compter d’abord sur les valeurs internes.
Pour l’instant dans un pays où on vous réclame des ‘‘Momo’’ comme si vous deviez, il serait temps de penser d’abord avec toutes les forces vives intérieures avant de compter sur l’extérieur qui perturbe plus qu’il n’aide nos nations.
Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe