Pénurie d’animatrices dans le public : La maternelle à l’épreuve des réformes

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Les Ecoles Maternelles Publiques (EMP) vont devoir continuer avec le personnel enseignant existentiel. Les réformes en cours ne facilitent pas un déploiement.

«Nous avons cinq (05) classes, mais nous évoluons avec deux animatrices au lieu de cinq. La gestion du personnel à l’école maternelle est très délicate, ce n’est pas facile. Nous nous battons pour la survie de l’école. Il faut reconnaître que cela fait plusieurs années que les écoles maternelles sont dépourvues d’animatrices ». Ces propos de Vénise Falola Djogbénou, la directrice de l’Ecole Maternelle Publique de Suru-Léré, relayés dans la parution N°0277 de l’hebdomadaire Educ’Action en date du mardi 05 mars 2019, sont toujours vifs. 06 ans après ce constat de terrain des reporters de Educ’Action, la situation n’a pas changé dans cette école située dans la Circonscription Scolaire Cotonou 2. La pénurie d’animatrices et d’animateurs dans les Ecoles Maternelles Publiques est devenue un mantra dans le rang des acteurs du sous-secteur de l’enseignement maternel. La vie des Ecoles Maternelles Publiques du Bénin est toujours compromise par la pénurie d’enseignants. Des groupes de classes et de sections surfent sur des éducatrices et éducateurs parfois dépourvus de compétences pour alléger la tâche. « Les éducatrices et éducateurs viennent combler le vide, mais il faut dire que leur rôle n’est pas d’animer les sections de la maternelle, mais d’aider l’animatrice ou l’enseignante qui est en situation de classe. Ils font des fiches que nous corrigeons. Nous allons dans les classes et déroulons des séquences qu’ils observent. Nous corrigeons au fur et à mesure », avait confié Vénise Falola Djogbénou, la directrice de l’Ecole Maternelle Publique de Suru-Léré. Cette situation évoquée devient ordinaire dans les écoles maternelles publiques du Bénin. Mieux, des écoles du sous-secteur de l’enseignement maternel souffrent d’un manque considérable d’animateurs. C’est le cas de l’Ecole Maternelle Publique Gnonri, dans la Circonscription Scolaire de Djougou 2, le département de la Donga. Tout comme d’autres directeurs et directrices d’écoles maternelles publiques, Pascal Lahouin, le directeur de cette école, vit la même situation. Dans son école à deux sections, il y a une éducatrice et un animateur. Le défaut de personnel s’observe dans cette école de 164 écoliers. « C’est vraiment compliqué pour nous. Car, nous avons un effectif pléthorique et les conditions d’apprentissage ne sont pas bien réunies. Nous sommes dans le besoin de personnel dans notre sous-secteur ». Ce plaidoyer qui revient tout le temps n’a pas encore reçu un écho favorable.

Les EMP, les oubliées du MEMP

Le dernier recrutement d’enseignants contractuels de l’Etat lancé le 26 octobre 2016 a permis de pourvoir en 2017, les EMP d’animatrices et d’animateurs. Au terme des résultats de ce concours, Adidjatou Mathys, la ministre du Travail et de la fonction publique s’est confondue en clarification. « … à l’issue du processus, on n’a pu recruter que 3 484 instituteurs pour l’enseignement maternel et primaire. Cela est dû au fait que sur les 140 places ouvertes au niveau de la maternelle, sa direction n’a enregistré que 23 candidatures. Selon elle, il y a un gap de 117 à combler. Cette différence sera rapportée sur le prochain concours de recrutements d’enseignants », peut-on lire sur le site d’information du quotidien public La Nation, le 11 janvier 2017. En 2019, une vague d’Aspirants au Métier d’Enseignant (AME) de la maternelle est déployée dans les écoles pour prêter main forte aux directeurs et directrices. Mais le gap à combler est considérable.

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Brigitte Amoussou, AME

Des AME en attente de déploiement, des réformes en cours…

Brigitte Amoussou, AME, est titulaire du Certificat d’Aptitude Professionnelle de l’Enseignement Maternel. Admise dans la base de données depuis 5 ans, elle est dans le désespoir. « Nous sommes tellement fatigués. Il arrive des moments où on se demande le péché que nous avions commis pour que l’Etat nous traite de cette manière. Cinq ans sans être déployés, nous avons souffert pour avoir les diplômes professionnels. Des collègues sont devenus malades à cause de cette situation. D’autres sont morts », confie-t-elle au prix de la douleur.
Une autre AME, Bénédicte Coffi, admise dans la base de données depuis 5 ans, partage relativement la même douleur que son homologue. « Le non-déploiement des AME de la maternelle entraîne le manque de considération à notre égard dans notre environnement. Je me demande ce qui m’a amenée à choisi l’option maternelle », confie-t-elle avant d’implorer la clémence du chef de l’Etat. Ils sont nombreux aujourd’hui, cette catégorie d’enseignants, à espérer un jour un quelconque déploiement pouvant alléger leur peine au quotidien. Mais c’est loin d’espérer cet idéal.
Une audience accordée, le mercredi 2 avril 2025, aux partenaires sociaux de la Commission Administrative Paritaire (CAP) par le ministre des Enseignements maternel et primaire a permis de savoir ce qui attend les AME non-déployés dans les écoles maternelles publiques. Dans le compte rendu du rapporteur de la CAP du MEMP, Arnaud Agbohounka, on retient : « le ministre a précisé qu’en raison des réformes en cours dans ce sous-secteur, il n’est pas encore possible d’affecter du personnel supplémentaire dans l’immédiat ». Selon nos indiscrétions, l’Ecole Maternelle Publique reste un luxe et nécessite des moyens colossaux.

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Pascal Lahouin, directeur de l’EMP Gnonri

Que disent des textes ?

Le point 4 des Objectifs de Développement Durable se veut clair : « Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ». Cependant, la question de l’égalité, voire de la qualité pose problème. Si certaines écoles maternelles sont peu ou prou pourvues d’animateurs et d’animatrices, d’autres sont dans le besoin. Or, conformément aux dispositions de l’arrêté N° 2021/036/MEMP/DC/SGM/CT/DAF/DEM/SA/023SGG21 portant attributions, organisation et fonctionnement de la Direction de l’Enseignement Maternel en son article 3 alinéa 11, « la Direction de l’Enseignement Maternel est responsable de la mise en œuvre de la politique de l’éducation et de la préscolarisation dans l’enseignement maternel. A ce titre, elle est chargée de déterminer, après avis conforme du Conseil National de l’Education, les besoins quantitatifs et qualitatifs en personnel d’enseignement et d’encadrement ».
Cette situation dans laquelle végètent les écoles maternelles publiques amène les enseignants à se surpasser.

Enock GUIDJIME

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