Père, repère et gagne !

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Efficaces pour réprimer, nos sociétés proposent trop peu de modèles. Aucun jour ne se passe sans qu’on n’apprenne le démantèlement réussi de tel ghetto de drogue, l’arrestation de vendeuses de faux médicaments ou encore celle de plusieurs cybercriminels. Et ensuite ? D’accord pour réprimer les hors-la-loi, mais comment accompagner moralement sinon socialement le reste de la population pour suivre le bon chemin, la bonne règle et surtout les bons repères ?
Si l’éducation incombe toujours plus à l’école, comment arriverons-nous à former des individus de type nouveau en forgeant leur caractère ? À ce stade de la lecture, certains vont abandonner et se dire qu’il va s’agir d’un énième brouillon de « il faut… ». Plus indulgents, d’autres penseront que la lecture des propositions prendra du temps. Or, nous sommes pressés ! Mais pressés de faire quoi, de réussir quoi sans la grande majorité de la population, inoccupée, improductive, plongée dans la pauvreté crasse et l’ignorance rebelle ?
On ne me sortira pas de l’esprit que, par rapport à maints pays africains, le Dahomey d’antan et le Bénin d’aujourd’hui s’y entendaient pour former des élites intellectuellement et moralement qualifiées. Que s’est-il passé et qu’est-ce qui manque aujourd’hui ?
Cette médiocratisation a plusieurs facteurs. Si le pays reste petit, sa population a largement augmenté. L’aspect économique et financier compte, mais surtout nos repères deviennent rares. D’ailleurs, plus personne ne semble s’interroger sur son projet de vie. Les anciens se rappelleront leurs cours de morale et d’éducation civique. Ces cours se donnent encore aujourd’hui, ne serait-ce que dans plusieurs écoles privées. Et pourtant, notre société est faite de paresse, de déviances multiples combinés au besoin du ludique et du futile. On dirait que la société ne forme que des citoyens cherchant d’abord le divertissement et surtout pas l’esprit d’entreprise, de travail bien fait.
Dans une autre chronique, nous avions proposé l’élaboration d’un document d’éducation civique. En même temps, il faudrait faire attention ! Une éducation civique qui insiste sur les lois ou les règles à suivre manquera son but. L’éducation civique qui néglige l’éducation du cœur et de la conscience sert peu, elle est improductive. Si on éduque la personne à comprendre le bien fondé des choses et à suivre les principes positifs de sa conscience morale, on n’aura nul besoin d’empiler des lois et règlements. La loi sert souvent à punir l’acte illégal commis par un être sans repère. Le premier commissariat de police préventif loge dans la conscience qui dit : « Ceci est bon pour autrui et pour toi, mais je te préviens, l’autre choix est nuisible. » Or, cette conscience morale s’affaiblit alors qu’on éprouve le besoin de contrôler et de réduire l’individu à néant afin qu’il ne demande rien, ne conteste pas et se réduise à un tube digestif qu’on nourrit peu et un cerveau qu’on appauvrit beaucoup.
La conscience affaiblie et amoindrie cherche des repères : l’enseignant qui incarnait la suprême référence n’est rien ; le chef de famille, autrefois personne intournable et premier conseiller en même temps que psychologue, revendique des parcelles de royauté à monnayer, qui le dévalorise et le met à la merci de quelques vagues politiciens. Ainsi la société ne produit plus d’êtres de référence autant dans le politique que le social voire le religieux. Cette religion qui devrait incarner ce lieu de référence est devenue le lieu de défoulement ou d’exutoire pour une population qui a pris des habitudes qu’elle ne peut laisser.
Qu’elle est la solution ? Elle est déjà claironnée. Maintenant, mettons-la en œuvre : il s’agit de reformater ce que nous appelons le capital humain. L’école a pour rôle fondamental d’éduquer : nos enfants doivent avoir l’opportunité de faire référence à des figures morales et intellectuelles de qualité, qu’on ne trouve plus malheureusement autour de nous. Il ne s’agit pas d’avoir à tous les coins de rue des Mandela. Faisons simple. Réhabilitons l’enseignant pour servir de première référence lorsqu’il aura à enseigner l’éducation morale, l’histoire et l’économie ; lui qui inspire plus la pitié que l’admiration de nos jours. Revenons au chef de famille retrouvée dans des communes où les services sociaux de base existent et où la valorisation des entreprises agricoles de subsistance permet de vivre. Comme le disait le poète togolais Jean-Marie Tchalla : « Qui vit sans père est sans repère. Qui vit sans repère, manque d’orientation. » Ce qu’il s’agit de soutenir, c’est qu’en définitive, une conscience morale forte et assumée crée des individus porteurs de qualité et impulse le bien-être des sociétés.

Maoudi Comlanvi JOHNSON, Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe

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