J’ai toujours voulu être polygame. Cela ne devrait pas être difficile car j’ai vu et admiré, l’immense maisonnée de mon grand–père paternel qui avait sa dépendance à étage et tout autour ses innombrables épouses et enfants. Mon père, en fils obéissant, a fait mieux que son papa, produisant une large descendance qui tutoie la cinquantaine.
Il m’arrive, lorsque je suis avec des personnes plus âgées et plus averties que moi, d’engager la conversation, en soulignant le fils irrespectueux et paresseux que je suis : J’avais une seule épouse et juste quelques enfants et demi. A part ma femme qui s’était fâchée, me traitant de bouc lubrique, plusieurs me dirent de suivre mon cœur et de peupler le Bénin.
Voulant mériter le titre de fils digne, j’eus la chance de rencontrer une accorte dame dont les pleins et les déliés ne semblaient pas avoir été maltraités par ses six maternités et ses trois maris. Elle préparait divinement et n’hésitait pas à chaque fois à venir m’aider dans cette ville où j’étais momentanément. Elle se dévouait de plus en plus, laissant, même, quelques vêtements chez moi. Un jour, au détour d’une cuisine terminée, elle se décida à aller prendre une douche et revint dans la chambre dans un pagne, qui dévêtait plus qu’il ne revêtait. La magie s’opéra et je nous retrouvais sur le lit en train de nous jurer amour et fidélité. A peine une embrassade, elle m’arrêta, éclata en sanglots et souligna qu’elle ne croyait plus aux hommes. Mais j’étais différent. Ah Si elle m’avait connu plus tôt ! Que voulais-je faire d’elle ? suis-je prêt à l’assurer financièrement et à la rassurer moralement ? Oui, je voulais assumer répondis-je pendant que mon téléphone sonna et que mes enfants, un à un me rappelèrent leurs scolarités et me ramenèrent à la réalité. Mes enfants plus les six de la dame ! Je devins songeur et regarda ma mie emballer pour toujours, tout désir envolé, ses atours et atouts.
Après avoir raté cette grande occasion je m’en ouvris à mon tailleur. Il m’expliqua qu’il avait déjà franchi le pas et voguait vers des félicités insoupçonnées avec ses deux femmes dans sa maison. Un de ses cousins peintre me rassura : « Ne t’arrête pas à une deuxième. Il est nécessaire de prendre une troisième pour déséquilibrer les disputes : c’est stratégique » !
Fort de ces précieux conseils, je décidais de me tourner vers le village où les femmes étaient encore sérieuses. J’appelai mon cousin du village, impoli politique et acrobate social par excellence, qui avait réponse et solution à tout. Il m’invita immédiatement au village m’assurant qu’il avait sous la main, une pucelle des plus chaste et soumise. Je me précipitai et me retrouvai avec une, tout sauf demoiselle, dont le phone était plus sophistiqué que le mien. Sans demander mon avis, on me fit visiter plusieurs maisonnées de parents, où je fus délesté de plusieurs billets et reçu la liste de la dot ! Rien, en définitive ne me plut : ni la femme, ni l’arnaque.
Je revins en ville et par le pur des hasards, je rencontrai enfin ma prochaine épouse au détour d’un temple. Je compris que le destin m’avait fait un choix divin. Elle avait la Bible dans une main et le chapelet dans l’autre. Oui, elle s’appelait Bénédicte. J’étais enfin amoureux. Nous nous retrouvâmes tous les jours et je connu tous ses malheurs passés et maintenant ses joies dans l’amour du Christ. Le pasteur me reçut et je devins un fidèle. On prépara le mariage mais le pasteur n’était pas pressé et nous demanda de mieux nous connaître.
Les jours passants, je constatai que ma dulcinée changeait et son ventre s’arrondissait malgré tous ses efforts. Etait-elle atteinte de kwashiorkor ? Avec le temps, je reconnus les signes d’une grossesse. Hélas, l’ange Gabriel avait encore frappé ! Vous vous souvenez qu’il avait annoncé à Marie sa conception. Je m’en ouvris à un des sages de l’église. Il me répondit : ce n’est pas Gabriel, c’est soit Satan soit le pasteur ! Disons les deux.
Un jour, subodorant quelque chose, ma femme sortit notre carnet de mariage et je rendis compte que je m’étais marié sous un régime monogamique. Je réfléchis longuement et je fis alors le projet de devenir musulman.
Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe