Quand l’éducation non formelle joue son rôle : Les enfants des alphabétisés réussissent mieux

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A côté de l’éducation formelle encore appelée éducation classique qui existe dans nos écoles, l’éducation non formelle joue un rôle assez important. Celui du maintien des apprenants, particulièrement les filles, à l’école. Une communication a fait le tour du sujet.

Au Bénin, l’éducation non formelle s’avère tout aussi capitale que celle formelle. Car, elle favorise l’autonomisation des femmes et, par ricochet, une éducation réussie des enfants des parents bénéficiaires. C’est ce qu’ont essayé de démontrer Ezin Jean-Pierre Dotché, docteur en Littérature africaine, Lettres-Modernes à l’Université d’Abomey-Calavi et Tatiana Kohounkpa, docteur en Sociologie du développement, dans la même Université, dans l’une des communications inscrites dans la revue du symposium. Il faut rappeler que ladite revue est l’une des nombreuses empruntes laissées par le groupe Educ’Action dans le système éducatif. Ceci, pour marquer sa contribution au rayonnement de l’éducation, après 10 années de vie au service de ce secteur reconnu comme étant important et primordial pour toutes les nations.
Pour la conception de ce document, les Dr Ezin Jean-Pierre Dotché et Tatiana Kohounkpa ont été sollicités, au regard de leur compétences, pour réfléchir sur : « L’apport des langues maternelles à la prise de conscience des parents non lettrés dans l’éducation des filles ». Au détour de leurs recherches et analyses, ces derniers ont réussi, à identifier l’éducation non formelle comme un moyen essentiel qui contraint les parents à maintenir leurs enfants, en l’occurrence les filles, dans le système éducatif. Portant le thème : « L’éducation non formelle, une stratégie de maintien des filles des bénéficiaires dans le cursus scolaire au Bénin », cette communication consignée dans cette revue du symposium « Média-Education-Développement », a révélé l’éducation non formelle comme un atout important qui aide à relever les deux plus grands défis de l’éducation, à savoir : l’accès et le maintien des apprenants dans le système éducatif. Il faut donc comprendre ce qu’on entend par éducation non formelle afin de mieux appréhender ses nombreux atouts pour le système.

Dr Ezin Jean-Pierre Dotché

De l’introduction des langues nationales dans le système éducatif

L’éducation non formelle, faut-il le rappeller, est une éducation différente de celle classique. Elle est un dispositif d’éducation mis en place par des structures compétentes pour donner des formations spécifiques et requises à des cibles particulières que sont en majorité les artisans qui n’ont pas fait le système classique. Cette éducation non formelle utilise comme support d’enseignement les langues nationales, notamment les langues de la post alphabétisation
Il ressort des recherches des docteurs cités plus haut, que l’éducation non formelle a de nombreux atouts. Mais avant de déboucher sur ces atouts, ces universitaires ont jugé opportun de faire la genèse de l’introduction de cette forme d’éducation qui place les langues nationales comme principal outil. On peut donc lire dans ce document, que la langue constitue un instrument de médiation qui non seulement permet de pénétrer l’âme de tout pays, mais aussi de maintenir l’Homme dans sa nature propre. Elle est alors un vecteur de développement. Au Bénin, l’histoire retrace qu’outre les langues nationales, le pays a hérité du français, la langue du colon et l’a adoptée comme langue officielle de travail. Mais cette situation n’est pas restée sans conséquences sur la politique éducative béninoise des années 60, ont-ils expliqué.
En effet, poursuivent-ils, « pendant la période des indépendances, le système éducatif était extraverti et calqué sur le système français, et ce, en fonction des accords signés par le Dahomey avec la métropole dans l’objectif de sauvegarde et de renforcement des liens culturels et linguistiques avec la France (Noudjènoumè, 1993) ». Mais très tôt, font-ils savoir, cette situation va être combattue par plusieurs acteurs qui ont montré l’inadéquation entre le système et les réalités locales. Le Bénin a alors entrepris, avec la révolution de 1972, une grande réforme de l’éducation dénommée ‘‘Ecole Nouvelle’’. Cette nouvelle dynamique a donc pour but, d’affirmer les valeurs essentielles d’émancipation et d’affirmation de l’identité culturelle nationale. « Former un citoyen béninois de type nouveau, politiquement engagé, techniquement valable, apte au travail productif, donc capable de transformer son milieu en comptant d’abord sur ses propres forces », est donc devenu la seule vision de cette nouvelle dynamique. En dehors de ce qu’implique donc cette nouvelle vision, un accent particulier a été mis sur l’alphabétisation et l’éducation en langues nationales dans le but d’un développement durable. Plusieurs réformes ont alors vu le jour pour que les langues nationales soient mises au cœur de l’enseignement. Malheureusement, des décennies après, le constat révèle que la déscolarisation précoce et même la non-scolarisation des filles, plombent les efforts de l’Etat. C’est ce qui a d’ailleurs conduit à la réorientation de la politique vers l’éducation non formelle liée à la formation professionnelle.

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Dr Tatiana Kohounkpa

Education non formelle, une éducation basée sur les langues nationales

Dr Ezin Jean-Pierre Dotché et Dr Tatiana Kohounkpa se sont référés à Joseph Poth, pour laisser entendre que les langues nationales considérées comme langues maternelles constituent un arsenal qui fournit au scolarisé, la possibilité de verbaliser sa pensée et de s’intégrer harmonieusement dans le monde qui l’environne. Ils vont également citer Piaget pour qui, « un apprenant apprendra d’autant mieux un type de structure ou d’emploi en langue seconde qu’il en aura préalablement compris les principes en langue maternelle et que les instruments heuristiques mis en œuvre pour découvrir ces principes dans la langue maternelle sont utilisables avec profit dans l’apprentissage des langues secondes. » On retient donc de cette citation que les langues maternelles favorisent la compréhension et le décollage de l’enfant.
Cependant, la vision de la nouvelle dynamique portée par ‘‘l’Ecole Nouvelle’’ ne laisse pas de côté, les adultes n’ayant pas été à l’école classique. Il a été donc décidé l’alphabétisation des adultes en langues nationales dans des centres d’alphabétisation disséminés dans les localités du pays, en particulier en milieu rural. En effet, les acteurs éducatifs ont réalisé que la capacité de lire et d’écrire est un enjeu vital, une condition essentielle pour permettre à un individu d’atteindre son potentiel et de voir ouvrir devant lui, les portes d’une plus grande autonomie. L’alphabétisation devient, par conséquent, un élément clé de l’apprentissage et de l’éducation des adultes. Elle permet aux bénéficiaires de lire et écrire, d’identifier, de comprendre, d’interpréter, de créer, de communiquer, de calculer et de résoudre des problèmes. Les études ont également prouvé qu’au-delà de cette autonomisation que confère l’alphabétisation aux adultes et qui est d’ailleurs l’un de ses atouts, elle leur permet aussi et surtout d’assurer une bonne éducation à leurs enfants, notamment les filles.

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L’éducation non formelle favorise le maintien des enfants dans l’école

Après avoir montré en quoi l’alphabétisation est un appui pour l’éducation des enfants, les communicateurs, tous docteurs dans leur domaine de prédilection, ont affirmé qu’elle contribue au maintien des enfants dans le cursus scolaire. Et c’est justement le second atout que cache l’éducation non formelle, selon eux.
De façon plus explicite, ils démontrent par là, que les parents ayant désormais été alphabétisés dans l’éducation non formelle, prennent plus conscience de leur rôle dans la formation et l’éducation de leurs enfants. C’est dire donc que dans un ménage où les parents ont été bénéficiaires de l’éducation non formelle (alphabétisation), le suivi des enfants est rapproché et s’inscrit dans le dispositif du contrôle parental. Il a été constaté que des parents ayant bénéficié de l’alphabétisation dans les centres d’éducation non formelle et qui sont dorénavant instruits, ont davantage tendance à envoyer leurs enfants, et principalement les filles, à l’école et qu’ils sont mieux outillés pour les aider pendant leur scolarité. Mais malgré l’autonomisation sous toutes ses formes et le maintien des enfants à l’école qu’induit l’éducation non formelle, il faut souligner que cette dernière ne dispose pas de tous les documents d’accompagnement, ce qui rend le travail difficile.

L’absence de documents, un os dans la gorge de l’éducation non formelle

Au Bénin, force est de constater que l’éducation non formelle, bien que son indispensabilité ait été prouvée dans cette communication, ne dispose pas toutefois de documents d’accompagnement. Ni de guides, ni de matériels didactiques, ni de manuels de cours tant pour les enseignants que pour les apprenants bénéficiaires. C’est une affirmation portée par Ezin Jean-Pierre Dotché, docteur en Littérature africaine, Lettres-Modernes à l’Université d’Abomey-Calavi et Tatiana Kohounkpa, docteur en Sociologie du développement à l’Université d’Abomey-Calavi. Une situation qui ne manque pas de porter préjudice à la qualité de l’enseignement/apprentissage. L’absence de terminologie pour la désignation de certains objets en langues, illustre bien cette affirmation. Ces raisons, avancent-ils, sont liées aux dispositions politiques en créant des lexiques langagiers spécialisés pour ces langues utilisées. C’est en cela que J. Ki-Zerbo affirme que « le problème des langues est capital parce qu’il touche l’identité des peuples ». Il faut aussi noter que les personnels d’encadrement et de contrôle ne sont pas suffisamment impliqués dans le processus de conception et surtout de formation aux fins d’assurer un encadrement rapproché sur le terrain.
Pour corriger un tant soit peu, la situation, certains auteurs cités par les co-communicateurs, proposent alors de mettre en place une politique linguistique et éducative qui dépasse le modèle d’un enseignement de langues simplement juxtaposées pour aboutir à un curriculum plus intégré. Lequel va insister sur le développement cognitif des apprenants et sur les difficultés d’apprentissage dans un premier temps, et favoriser le développement d’une éducation plus holistique, dans un second temps. De même, ils suggèrent de placer la reconnaissance d’une compétence qu’ils appellent translinguistique au cœur des préoccupations de la didactique, etc. Aussi, pensent-ils, il faut impliquer des acteurs du système de l’utilisation des langues nationales dans le système non formel et formel en vue de faciliter la communication, car le constat montre que des enseignants éprouvent des difficultés d’adaptation et de réinvestissement.

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Estelle DJIGRI

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