Je suis un taureau ! Et encore un taureau de qualité. Honnêtement, je ne le savais pas du tout. C’est au détour d’un documentaire que j’ai découvert cet animal ou plutôt cet insecte appelé scarabée taureau ou bousier auquel je m’apparente parfaitement comme nombre de béninois. On se ressemble tellement car il vit dans la merde, le caca, et il s’en sort ! La ressemblance est encore plus frappante lorsqu’on se rend compte qu’au regard de sa taille, il fait des travaux d’hercule allant jusqu’à tirer plus de 1000 fois sa masse corporelle.
Vous nous retrouvez ! Les problèmes sont si nombreux que notre vie ne nous offre rien de ragoutant dans nos contrées. Vous vous demandez ensuite comment pouvions-nous prétendre avoir cette force surhumaine à la manière de ce coléoptère, pour avancer. Bien sûr que nous sommes forts, nous sommes même puissants sinon surhumains pour parvenir à tenir dans cette vie où, de plus en plus, rien n’est permis ou tout est défendu. Ceci a amené un anonyme qui n’est surement pas de notre sympathique pays, à constater : tu parles, on te prend ; tu écris, on te prend, tu marches, on te prend, tu partages l’info, on te prend, bref tu bouges, on te prend. Mais qu’est-ce qu’il nous reste donc à faire devant des gamelles vides face à des femmes et enfants qui pleurent ? Être spectateur tout en prenant comme devise cette maxime stoïcienne qui va contenter nos maîtres : « supportes et abstiens toi »
On se dit, alors que le pouvoir d’aider, de décider, de partager pour être aussi une autorité ou un personnage dans la cité, n’appartient pas seulement aux politiciens et à nos quelques rares financiers. On en revient alors à notre qualité de taureau qui récupère chaque mois un salaire insuffisant, qui est à la retraite et se débat avec une pension de survie. Et pourtant, avec ce maigre pécule, nous recevons au moins une douzaine de sollicitations chaque mois et, nous nous exécutons autant que faire se peut, pour satisfaire les gens du village, la belle famille, la femme et les enfants et beaucoup d’autres personnes qui relèvent plus de l’aléatoire que du nécessaire. Quand on se compare à nos autorités politiques et financiers, on se rend compte que, malgré leur hauteur, leur puissance financière, nous, apparemment petits sinon minuscules, en faisons de très loin plus qu’eux ! De plus, une seule chose leur manque souvent : ce n’est ni la charité qu’ils ont appris à étouffer sous des tonnes de cynisme et surtout pas la justice car, ils font et défont les lois. C’est plutôt ce que nos ancêtres nous ont légué à savoir le respect de la dignité de l’autre ; la solidarité. Et dans ce monde tourmenté, ils n’arrivent même pas à donner leur superflu fait de dépenses dans le stupre et les déviances pour ceux qui en ont besoin, alors que nous, partageons notre nécessaire.
Mais comment faisons-nous pour satisfaire tout ce monde ? Généralement, il s’ajoutait quelques missions, une petite ferme que nous entretenons au village et d’autres petites affaires. Sans oublier le commerce de madame qui nourrit notre quotidien et celui des enfants Ainsi, plusieurs personnes trouvent leur compte grâce à nous. Mais, ce vivre-ensemble disparaît de plus en plus, pour un modèle différent où l’argent n’arrive même plus à servir les besoins parce qu’il se dépense de nos jours, dans l’inessentiel, l’inutile, voire le futile : whatsapp, canal plus, tik-tok qui deviennent des besoins compulsifs. Il faut ajouter à tout cela les royaumes de débauches faits de lieux de plaisirs troubles et de demoiselles qui passent la journée à payer leurs tontines et besoins grâce à l’appel de dizaines d’hommes répondant malgré eux au fatal cc, comment vas-tu ?
Maoudi Comlanvi JOHNSON,
Planificateur de l’Education, Sociologue, Philosophe
