La scolarisation des filles est une thématique qui préoccupe les auteurs. Dans sa première production livresque ‘‘Un destin rattrapé’’, parue en 2021, aux éditions Béninlivres, le jeune auteur béninois Alexis Feligbé sensibilise à l’inscription des filles à l’école. Découverte !
Le Fâ a tranché : Vigan est sommé de scolariser sa fille Lolo, à compter de la nouvelle rentrée scolaire. Ardent défenseur de la tradition ancestrale, le vieil homme décide de désobéir, pour la première fois dans l’histoire, aux ancêtres. La décision du chef de famille est irrévocable, sa fille Lolo n’ira pas à l’école. En réalité, Vigan est un fanatique du personnage Fadiga le muezzin, dans le roman ‘‘Sous l’Orage’’ de Seydou Badian, qui soutient : « Les filles qui fréquentent ce milieu cherchent à tout résoudre par elles-mêmes, certaines vont jusqu’à choisir leur mari. Ma fille à moi ne verra jamais les portes de ce lieu. » C’est ce qui motive la position tranchée du polygame sur la non-scolarisation de sa fille Lolo. C’est la thématique abordée dans le livre « Un destin rattrapé ». Ce roman de 154 pages publié, en juillet 2021, s’inscrit dans une approche de sensibilisation à la scolarisation des filles. L’auteur Alexis Feligbé, diplômé en lettres modernes de son état, raconte le drame pour essayer de faire comprendre à l’opinion publique l’importance de garantir le droit à l’éducation aussi bien aux garçons qu’aux filles. L’histoire se déroule en plein XXIe siècle où la scolarisation des filles continue de faire couler d’encre, de salive. Dans ce roman, l’auteur plonge également le lecteur dans la coexistence religion endogène et religion chrétienne. L’auteur qui voue un penchant pour les valeurs endogènes d’Afrique exprime l’importance que cela revêt pour l’africain, quelle que soit son obédience religieuse. A la page 80, Fernande, en préparation de la dot s’exprime : « Tante, moi aussi je suis chrétienne comme vous. Mais, je reste attachée à mes valeurs ancestrales. Ce sont elles qui me définissent comme une vraie africaine. Ce n’est pas du polythéisme, mais de l’ouverture ». En opposition à son mari, Lolonon est déterminée à ce que sa fille trouve le chemin des classes. Le secours va venir de Yaovè, la sœur de Lolonon résident à Cotonou.
La rencontre de Mariam, la millionnaire ouvre les portes de l’école pour Lolo
« Il y a 17 ans que Lolo fut inscrite à l’école. Ecolière studieuse et travailleuse, elle n’avait perdu aucun sens du travail bien fait. Elle connut un excellent cursus scolaire et universitaire. » Le rêve de Lolo s’est concrétisé et à la fin de ses études universitaires, elle devient inspectrice de police avant de se retrouver plus tard dans une situation embarrassante. Elle est appelée à décider du sort de son père qui est tombé sous le coup de la loi. Nous sommes à la page 150 : « Lolo, les larmes aux yeux, sans rien dire, sortit du bureau, laissant son père et sa mère seuls. Faudrait-il appliquer la loi à mon père, celui qui ne voudrait pas entendre parler de ma scolarisation ? Dois-je l’envoyer devant le procureur ou classer l’affaire et fêter nos retrouvailles, s’interroge-t-elle. »
Un hommage rendu aux aînés de la profession
Alexis Feligbé est au départ un passionné du livre et de la lecture avant de devenir auteur. Cela se remarque aisément à travers l’intertextualité qui a jalonné ce premier ouvrage. Dans son livre ‘‘Un destin rattrapé’’, le jeune auteur a rendu hommage à Olympe Bhêly-Quenum à travers son livre ‘‘Un piège sans fin’’, à Habib Dakpogan pour ses livres ‘‘Etha Contest’’ et ‘‘PV Salle 6’’, à Molière pour son livre ‘‘Les trois femmes savantes’’, à Sophie Adonon pour sa publication ‘‘Le salut tumulaire’’, au professeur Mahugnon Kakpo pour le livre ‘‘La naissance du Fâ, l’enfant qui parle dans le ventre de sa mère’’, à Gratien Ahouanmènou pour avoir publié son livre ‘‘Quelques clés d’ifa, sagesse d’existentielle du Golfe de Guinée’’ et Basile Adjou-Moumouni qui a écrit ‘‘Le code de vie du primitif : sagesses africaines selon Ifa’’.
Ce livre de Alexis Feligbé a fait objet d’un tournage de film en 2023 sous l’initiative de la maison de production « Ola Olu » du réalisateur Christian Noukpo Whannou. C’est une production qui s’inscrit dans la droite ligne de la thématique abordée dans le livre, celle du militantisme en faveur de la scolarisation des filles, l’émancipation et l’autonomisation des femmes.
Edouard KATCHIKPE